● La diabolisation comme arme de destruction politique 

On entend ici et là, que le candidat à la présidentielle de juin, Biram Dah Abeid ne peut pas diriger la Mauritanie.  On lui reproche de tenir un discours extrémiste, violent, pourfendeur et dézingueur qui détruit tout, y compris de l’unité nationale.

Ce sont ces mêmes personnes qui ont diabolisé des années durant, le leader charismatique de la cause négro mauritanienne, Samba Thiam en le taxant de raciste, d’anti Beydane pour le rendre épouvantable et infréquentable.

Idem pour Ibrahima Moctar SARR  de l’AJDM/R parce que, lui aussi, a toujours su trouver les mots justes, adéquats et appropriés mais acerbes pour qualifier le système, pour le décrire, le décrypter et le mettre à nu sans complaisance. Les maux ont peur des mots. La dénonciation finira toujours par vaincre l’injustice et la dictature.

Dans une histoire récente, de l’autre côté du fleuve aussi, on a vu des gens de la même espèce tenir les mêmes propos contre les leaders du Pastef, en l’occurrence Ousmane Sonko, le qualifiant d’extrémiste, dangereux pour le Sénégal. Incapable de diriger ce pays au risque de le conduire vers le chaos. 

En dépit de tout ce qu’on a dit d’Ousmane Sonko et du Pastef, les Sénégalais ont résisté en refusant de se faire manipuler. La page, Macky SALL et ses acolytes est tournée de la plus belle des manières par les urnes : l’alternance dans sa forme la plus achevée et complète. La rupture est désormais effective avec à la clé un changement générationnel, un nouveau Sénégal est en gestation. 

En vérité, ceux qui tiennent de tels propos, ici et ailleurs, ont quelque chose en commun. Ils sont soit au pouvoir, proches du pouvoir ou bénéficient des avantages du pouvoir (du système) qu’ils entendent préserver à tout prix, y compris par la diabolisation, la mystification, la calomnie, la manipulation…

Quant aux victimes de ces campagnes obscènes et diffamatoires, elles présentent généralement les mêmes similitudes : elles s’opposent à un système mafieux, à un pouvoir discrédité, souvent à la dérive, et qui entend éliminer par toutes sortes de méthodes déloyales et anti démocratique ses adversaires.

Ainsi, les véritables challengers sont traqués, combattus, souvent par « la main représailles » du pouvoir : les forces de défense et de sécurité. Et comme ces genres de pouvoirs ont pour slogan et morale  » la fin justifie les moyens « , ils mettent en branle toutes sortes de stratégies, de plans machiavéliques et macabres pour arriver à leurs fins.

Il ressort de ces deux exemples que pour déboulonner un système politique arbitraire, discriminatoire, autocratique et inique, il faut des mots forts, un discours virulent. Une telle attitude est une réponse à la violence et ne saurait être considérée comme de la violence. Il n’y a pas plus de violence que les violences policières, l’usage disproportionné des grenades lacrymogènes etc. Quid de la corruption qui compromet l’avenir des générations futures en contribuant grandement à la paupérisation.

Il n’y a pas plus violent qu’un système politique mafieux qui détruit et exclut systématiquement tous ceux qui ne sont pas du sérail, du clan, du cercle fermé, un univers constitué exclusivement de quelques privilégiés, qui sont aux commandes du pays depuis l’indépendance. 

Si bien que l’égalité des chances n’est qu’un vain mot. L’école ne sert plus à grand-chose. D’ailleurs, elle a cessé d’être un ascenseur social depuis qu’elle a été décrétée Républicaine. Les diplômes, la compétence et les études ne sont plus considérés comme des vecteurs de réussite sociale. Il vaut mieux décliner le nom de son père, son patronyme : Ould Velanne, de telle tribu…

Pour briser ce système oligarchique (militaro-féodalo- tribalo-raciste), une telle véritable  machine à fabriquer les inégalités, la corruption, les injustices de toutes sortes, en contradiction avec l’Etat de droit, la république, la démocratie et de l’islam, il va bien falloir « dégainer » des mots forts, des « missiles » en dénonçant avec force et vigueur. 

Dans cet exercice de diabolisation, on joue sur les peurs et elle prend toutes les formes. On va fouiller dans les origines sociales, familiales, dans le parcours scolaire, académique où professionnel de l’opposant pour chercher la petite bête. Si tout est clean. C’est rarement le cas d’ailleurs, en effet qui cherche finira toujours par trouver.
Ainsi, vous conviendrez avec moi, que Biram est victime d’un faux procès du genre : « il va déstabiliser le pays, il va le vendre au diable, il n’a point d’expériences dans la gestion de État » etc. Cependant, en dépit des nombreuses campagnes de déstabilisation, de coups bas, et toutes sortes de stratégies utilisées, depuis l’ère Mohamed Ould Abdel Aziz pour éliminer l’homme, il résiste vaillamment.

Et comme requinqué plus que jamais, il donne du fil à retordre au pouvoir en créant une situation inédite dans le pays où la réélection du président sortant fait douter plus d’un.

A mesure qu’on s’approche du scrutin du 29 juin, le scepticisme est de mise quant à la victoire du pouvoir ; à en croire les échos de la campagne et la mobilisation des citoyens plutôt favorables au changement, à la mise à mort du système politique en place depuis plusieurs décennies.

Mais, en Afrique, l’issue d’une élection est toujours mystérieuse. Que d’acteurs visibles mais surtout invisibles interagissent pour faire basculer le suffrage des électeurs du côté qu’ils n’ont souvent pas choisi. La sécurisation des votes est dès lors essentielle et constitue tout l’enjeu de cette présidentielle.

Seyré SIDIBE

• Lien média https://ondeinfo.com/la-diabolisation-comme-arme-de-destruction-politique/?fbclid=IwZXh0bgNhZW0CMTEAAR23jdWSQkssrl0Tq4Bor3WE58OAQqgfdPJbJodKH7hyfhULSyif2WKxIWc_aem_FJ8XHZOT1KzTOLDTIR5rXg

● Réponse à la sortie médiatico-politique de Baliou Mamayary Coulibaly | Par M. Souleymane Sidibé

Je souhaite exprimer mon profond désaccord avec les récentes déclarations de Baliou Coulibaly. Elles semblent davantage motivées par des louanges politiques infondées et des calculs stratégiques que par une analyse factuelle et objective. Certes, la campagne présidentielle est un moment d’euphorie, mais il est crucial de garder raison dans son soutien et dans les lauriers que l’on décerne à son candidat.

Il est nécessaire d’apporter des clarifications afin d’éviter toute confusion :

Primo, en ce qui concerne le soutien de Biram Dah Abeid, il est impératif de rectifier les faits. Contrairement aux affirmations de Baliou Coulibaly, dont je pense que l’engagement détaché serait plus utile que cette sortie, Biram Dah Abeid ne l’a pas soutenu lorsqu’il était confronté aux défenseurs du statut quo social inique. En réalité, Biram l’a confronté à l’un des éléments pouvant lui rapporter un électorat, démontrant ainsi l’absence de soutien mutuel dans cette situation.

Deuxio, lors de la première réunion non officielle de l’ARMEPES, l’IRA n’était pas encore fondée. Les insinuations selon lesquelles le courage en milieu sooninké en matière de lutte contre l’esclavage est né avec l’apparition de son « messie » sont non seulement erronées, mais également trompeuses et historiquement inexactes.

Tertio, affirmer que c’est grâce à Biram Dah Abeid que la dénonciation de l’esclavage en milieu sooninké a commencé est une contre-vérité flagrante. De nombreux militants ont travaillé ardemment bien avant l’émergence de figures médiatiques comme Biram, et leurs efforts ne doivent pas être ignorés ou minimisés. Des mouvements comme El Hor ont eu un impact significatif. Dans les milieux où l’on dénonce encore les réflexes de subordination et où des centaines de familles refusent depuis les années 70 le bouclier de protection des tares qu’est le laadalenmaxu, des mouvements comme AMEES ont posé des actions concrètes.

De ce fait, la lutte contre l’esclavage et les injustices sociales mérite une approche rigoureuse et honnête. Les tentatives de récupération politique ne font que diviser et désinformer, trahissant ainsi les efforts de nombreux activistes dévoués.
Pourquoi ne pas miser sur le bon cheval ? Cette question mérite une réponse. À défaut de savoir pourquoi attribuer une « paternité » dans la lutte contre les inégalités sociales à un candidat dont on connaît les mérites, malgré les divergences, et qui n’a pas besoin de cela, voici ma réponse :

Pour nous, la politique est un moyen de discuter des destinées dans un contexte géopolitique et géostratégique. Nous ne soutenons pas un candidat médiocre. Ce sont d’abord le discours et le parcours qui comptent. À cela s’ajoutent le respect et la bienveillance, qualités essentielles pour un leader.

Nous misons sur le bon profil, les compétences et le sérieux. Nous ne sommes pas du genre à nous limiter aux désidératas d’un homme politique. Pour moi, le bon profil c’est quelqu’un qui vit de son savoir, de ses compétences et qui ne se perd pas dans les manœuvres politiques mesquines. La politique est un art, et je veux un leader exemplaire, sans casseroles à traîner. Mon soutien est personnel. Ceux qui sont convaincus continueront avec ceux qui font des calculs stratégiques, et ceux qui ne le sont plus, s’en iront. Notre véritable adversaire, c’est le régime en place.

Je reste engagé à soutenir une cause juste et à collaborer avec tous ceux qui partagent cet engagement, sans opportunisme ni manipulations.

Souleymane Sidibé 
Bordeaux, le 24 juin 2024.