● Le Grand Entretien du Blog | Avec Souleymane SIDIBÉ

La rubrique Grand Entretien du Blog (Le GEB) vous propose l’interview avec l’étudiant mauritanien M. Souleymane Sidibé. Notre Blog a publié  différentes contributions sous sa plume sur des thématiques variées. Ici, il accepte de répondre à nos questions axées sur son parcours et sur des thèmes plus ou moins divers. Nos remerciements à lui pour cette disponibilité.

Ci-après l’intégralité de l’interview :

Question 1 : Bonjour monsieur Sidibé, nos remerciements pour votre disponibilité, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Souleymane Sidibé : Bonjour Koundou Soumaré. C’est un plaisir pour moi de répondre aux questions de votre blog. Je m’appelle Souleymane Sidibé. Je suis né à Nouakchott à Sebkha et j’ai passé mon enfance entre Socogim K (notre maison familiale ), Sixième chez mes grand-parents, Socogim Bagdad, Socogim Ps un peu; Ilok K et Tevragh Zeine avec les amis. Je suis nouakchottois.  Après les études primaires à Dioukhamadya (Médina 3) jusqu’en première année collège dans le programme mauritanien, j’ai rejoint le système éducatif français en classe de 5ème (2e année collège) au Petit Centre (Ilot K) ; puis au Lycée Privé du Sahel. J’ai quitté la Mauritanie pour Bordeaux après l’obtention du bac S que j’ai passé au Lycée Français Théodore Monod (LFTM) de Nouakchott en 2016. Cela m’a fait découvrir l’Université de Bordeaux en France, à mes 18 ans, dans un parcours Santé que je n’ai pas pu poursuivre ; ensuite, je me suis inscrit en biologie. J’ai également pris des cours en gestion et maîtrise de l’eau dans une université privée .

● Question 2 : Étudiant mauritanien et africain en France depuis quelques années, quelle expérience en tirez-vous jusqu’à là ? Atouts et pièges éventuels à éviter pour des futurs étudiants…

SS : Vieil étudiant, dirais-je. J’avoue qu’être étudiant en France, c’est d’abord être confronté à une autre réalité, un autre rythme de vie et de travail. Les cours sont une continuité de ce que l’on a étudié, mais les codes culturels ainsi que le sérieux demandé, la rigueur et le statut d’étudiant nous renvoient dans d’autres référentiels. Tout d’abord, être étudiant est un statut dans un pays d’accueil pour le nouvel étudiant que je fus. Il fallait étudier en étant dans l’obligation de moyens afin d’attester de ma situation d’étudiant. Il faut fournir chaque année son évolution. L’obligation de réussite s’impose après un ou deux échecs pour ne pas perdre ce statut. La vie estudiantine est un passage dans lequel on suit un apprentissage. Chaque cours, chaque TD, chaque TP, dans le domaine qui est le mien, même ailleurs, est l’occasion d’apprendre quelque chose de nouveau. Ensuite, on élargit ses perspectives en ayant un projet d’études ou en le construisant tout au long, on devient résilient. On apprend à gérer son temps, faire le ménage -ce que ma mère m’avait habitué les fins de semaines-, faire la cuisine ; on cultive ses relations personnelles tout au long. Enfin, pour me permettre de donner un conseil à un futur étudiant ou une étudiante, c’est de croire en soi en étant réaliste. Les études en France demandent des moyens. Il faut des ressources financières, de l’argent. Si l’on n’a pas beaucoup de moyens, on ne peut pas s’inscrire dans certaines écoles. Même si c’est dans le public. Il faut alors ajuster ses ambitions. Et surtout favoriser actuellement les formations avec des alternances quand on a un peu d’aide parentale, familiale. Il est important de rester focus en étant ouvert au conseil. C’est très difficile de faire certains parcours en travaillant, par exemple, dans la restauration en parallèle. Étant donné qu’il s’agit d’un apprentissage et d’un enrichissement continus, parlant de la vie d’étudiant, c’est alors nécessaire de faire régulièrement un bilan de ses expériences. Quand on est là, comme tout le monde, on se met petit à petit dans le bain sans se faire un sang d’encre ou se mettre la rate au court-bouillon. C’est aussi important de changer d’habitude ainsi que prendre soin de sa santé mentale et physique.

● Question 3 : Vous avez publié un recueil de poèmes intitulé La Poésie démeurt, il y a de cela quelques temps, pouvez-vous nous présenter brièvement cet ouvrage et comment peut-on se le procurer ?

SS : La Poésie démeurt est un recueil que j’ai écrit pour déclarer mon amour à la poésie. J’écris toujours et lis dès que l’occasion s’offre. On lit en prélude l’hommage à ma tante décédée à Paris. C’est un livre à sa mémoire. Un format de 68 pages publié chez Les Editions Universitaires (Muse) que je déconseille et un autre chez Amazon contenant 203 pages. Je remets la présentation du livre sur les sites de vente ou en bibliothèque à partir de ISBN 979-8496349680. La Poésie démeurt rassemble des poèmes que j’ai écrits entre 2016 et 2021. Entre cris nocturnes, mélancoliques et réflexions philosophiques, ce recueil s’imprègne d’une écriture rythmée et lamentée par le quotidien. Le recueil de poèmes parle du continent africain, de la patrie, de mes études, de son auteur, de l’amour-ses contradictions, son dévouement et sa belle cruauté-, également de belles choses de la vie, et son épitaphe : la mort. En poète amateur, je survole le monde par les mots en pansant les maux. Je suis un admirateur des grands noms de la poésie à l’image de Ousmane Moussa Diagana de mon pays comme des auteurs de ce que je qualifie de poésie-merveille (parlant de la poésie française). Je dessine mon monde à dessein des autres calamités.

● Question 4 : Ces dernières années, la communauté sooninké vit beaucoup de frictions sociales liées à l’organisation intra-communautaire (féodalisme, discriminations…) et au phénomène de l’esclavage statutaire, comme jeune sooninké lettré en phase universitaire, quelles sont vos réflexions à propos ?

SS : La communauté sooninké a vécu des conflits bien avant la Seconde Guerre mondiale. Des villages sont nés au fil du temps suite à des discordes, des batailles rudes, des installations de campements… Il y a des survivances idéologiques liées à l’esclavage et à la féodalité. Les rapports ancestraux fossilisés pour parler comme le chercheur Sidi Ndiaye animent les imaginaires collectifs de différentes fractions sociales. Nous avons au sein de cette communauté comme dans d’autres en Mauritanie une organisation étriquée que la culture citoyenne doit balayer. Cela n’est malheureusement pas possible d’un simple revers de main. Il faut l’implication des acteurs sérieux des droits humains et des politiques débarrassés des préjugés sociaux. L’esclavage statutaire est une réalité. On voit même des individus avancer des propos pour justifier qu’ils ne sont pas issus d’une certaine catégorisation sociale en indexant d’autres. Il est urgent de se débarrasser de l’idée de la noblesse. L’idée de la citoyenneté doit naître au profit de tous ses maux. Les laada (accords coutumiers) étaient les verrous du rapport subalterne ou dominé socialement (kome, sakke, tage, etc) au moodi (marabout statutaire) et hoore (noble) dans le milieu sooninké. Il y a eu des  familles engagées contre cette supercherie pour plusieurs raisons (éducation moderne, fierté culturelle, etc), mais il faut connaître qu’avec l’arrivé du mouvement Gambanaaxu qui un consortium d’association luttant pour l’égalité citoyenne en milieu sooninké, la donne a considérablement changé. On a vu pulluler des contre-mouvements qui ne font ni le poids électoral ni la force de conviction et de sérieux ; nullement comparable se cachant derrière un fantasme social que le capitalisme ne considère pas. L’Etat changera d’allier inévitablement si l’occasion se présente. Les militants de Gambana (l’éveil citoyen) -pour ceux que je connais- ne font pas du militantisme à la carte comparée à bon nombre de d’associations.
Je pense simplement que la vie, c’est quelques fois des rapports de force. Il faut arriver à démystifier le discours des tenants de l’ordre inique qui vivent avec nous et nous sourient à longueur de journée. Après les laada, la démystification des discours puérils dans les oreilles d’un citoyen moderne, il faut se former, se donner les ressources financières et tester son coefficient d’adversité. Il s’agit d’un mépris historique, je ne vois pas d’autres voies à part le terrain de la lutte des idées et la revendication du respect. Sur le terrain scientifique, il y a eu des écrits pertinents. Il ne s’agit plus de «cogito», cogiter (penser), mais de “practise” (pratique). La pratique, c’est ce qui est demandé. L’appellation Jabankaanu est le nom redonné à un quartier dans un village du Guidimakha à la place de komo n kani. Ce montre l’esprit alerte de la nouvelle génération, même de l’ancienne de se débarrasser des tares. Avant, certains vieux disaient «o komon kaani», se traduisant par «chez nous esclaves». Cette appellation était implantée dans leur conscience.
Je discutais avec un monsieur il y a de cela quelques années. J’ai voulu à travers lui comprendre l’organisation sociale. Je n’ai été au village qu’une fois et ce, étant très petit. Je lui ai avancé quelques arguments pour la destruction des tares. Il me dit que son village -dont je tairai le nom-, c’est pour « leurs esclaves » et eux. J’analysais son discours et essayais de comprendre les mécanismes qui régissent sa pensée et son être. Je lui ai posé la question de savoir s’il pouvait se marier avec une personne issu du groupe qu’il qualifie de komo. Il me répondit : « Non, pour rien au monde. Pourquoi ont-ils accepté cette dénomination ? ». Cette réponse est parlante. Comment on justifie idéologiquement la perception féodale ? C’est pour montrer là que le discours qui légitiment cela doit être attaqué. En tant que jeune apprenant, j’espère continuer à l’être dans ce monde où le savoir et la bonne information sont importants, Il y a des jeunes qui ne tiennent plus compte du référentiel coutumier. Les choses avancent, tant mieux. Tant pis pour les blessés de l’existence qui sont encore attachés à leur illusion. Nous devons aspirer à une chose : c’est la citoyenneté. C’est difficile avec l’absence des politiques publiques, l’école pour tous et les arguments de militants des droits humains. On  remarque que la hiérarchisation de la société sooninké suit son cours jusqu’en France. Les noms des foyers ont des connotations. Certains font appel à des religieux coutumiers pour les festivités. Il y a des tenants du système inique. Ces dernières années sont tout de même l’amorce de l’éveil citoyen en masse. C’est du concret.

● Question 5 : Concernant l’éducation, beaucoup d’initiatives sont prises au sein des communautés villageoises sooninké du Guidimakha (système hybride Mahadra- école) en dehors du cadre de l’enseignement étatique, vous y voyez quoi en termes d’inconvénients et d’avantages ? Et quel regard portez-vous sur l’éducation des jeunes filles dans nos communautés ? Et vos préconisations éventuelles en la matière ?

SS : Je ne suis pas un fin connaisseur du village à proprement parler, puisque je n’y ai pas vécu. Je connais l’organisation et observe les individus issus de ce milieu. En ce sens, il m’arrive d’observer et faire mon analyse à partir des ressortissants qui clament leur fierté. Ces dernières années, l’élément religieux (la conduite de la prière, les prêches du vendredi, le tissage des liens matrimoniaux, les baptêmes en partie…) n’est plus une propriété privée d’une famille qui se dit garante de la religion au sein du village ou des villes. La connaissance prime dans les grandes villes, de nos jours. Quelques émigrés financent l’école coranique de leurs enfants pour ensuite construire des mosquées afin qu’ils y enseignent la parole d’Allah. Cette approche n’a pas pour objectif premier de déconstruire les survivances idéologiques. Tout de même, elle aide à l’émancipation des mentalités en mettant en avant l’idée de croyant. Il jongle dans une vision entre le délaissement de ce qui est proscrit (interdit) et la mise en avant de ce qui lui est prescrit à côté de celle que doit véhiculer une nation. Je parle de l’idée de citoyen.
Ce que tu appelles système hybride est une juxtaposition de deux systèmes d’apprentissage. D’un côté, on a les madrassas comme on appelle les mahadras dans les milieux ruraux du Guidimakha qui sont un espace pour l’apprentissage de l’arabe et du coran où l’enfant apprend les lettres originelles. Cet apprentissage suit sa pédagogie. Et, d’un autre, on voit l’école – censée être- républicaine.  Elle est délabrée à l’instant où j’écris ces quelques mots. Il faut la refonder et assainir de façon matérielle et immatérielle. Malgré les différents manquements, l’école moderne doit être la priorité pour saisir son environnement, assurer son lendemain par une formation classique ou professionnelle et se perfectionner pour la vie en société. On peut entendre par «système hybride», le renforcement de l’arabe et de l’apprentissage de la religion dans le programme scolaire.  A Nouakchott, les enfants arrivent à apprendre les lettres «originelles» à la maison. On doit favoriser l’école à mon sens pour la formation qualitative axée sur l’aspect citoyen et technique. Nos universités doivent accueillir des étudiantes et étudiants ayant des prérequis (savoir et savoir-faire) pour affronter le monde du travail, la recherche scientifique et laisser en place des filières pour les personnes désireuses de continuer dans les sciences sociales et les sciences dites islamiques. Ce n’est pas le rôle des collèges et lycée. Ce système hybride dans le deuxième cas est un échec assuré. Concernant les jeunes filles appelées à devenir des femmes à partir de la maturité, notre société doit comprendre qu’elles sont des citoyennes entières et non pas à part entière. L’hypersexualisation dès le bas âge avec tout un pan culturel doit cesser. Les jeunes femmes doivent assurer les mêmes postes, car elles ont droit aux mêmes qualifications. Je vais de ce principe. Combien de familles ont sacrifié les études de jeunes femmes à cause d’un mariage ? Cette «programmation » au foyer met en danger des vocations. Le manque d’éducation est un danger pour la santé même. Comment comprendre la reproduction féminine et les maladies qui n’épargnent pas à l’image des cancers du col de l’utérus et du sein qui sont fréquents ? C’est à travers l’éducation que l’on agrandit ses horizons, et l’école est le point le plus crucial pour arriver à se construire. Je pense que l’on ne peut pas inventer d’autres combats. Soutenons les combats sur le terrain, partageons et mettons en valeurs les femmes qui se sont émancipées du poids social pour émerger. Elles sont nombreuses. Quand il y a souvent des sorties pour la promotion de l’éducation des jeunes filles, on voit plus d’hommes et peu de femmes. Toute occasion est bonne pour faire la promotion du système patriarcal qui prédomine. Les choses bougent dans les grandes villes. Hélas, on peine encore à recenser des filles parmi les admis au baccalauréat dans les villages. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas une sensibilisation au sein des terroirs. La volonté y est, mais les moyens étatiques sont maigres. L’assertion de Cheikh Sadbouh Kamara est comprise dans certains foyers. «De nos jours, le premier mari d’une femme, c’est son salaire », disait-il. Le projet professionnel et la compétence avant le projet matrimonial.

Question 6 : Vous publiez régulièrement sur les réseaux sociaux (votre page Facebook notamment) sur diverses thématiques, quelle analyse faites-vous de la situation politique et sociale mauritanienne après les élections générales de mai 2023 ?

SS : Effectivement ! Je publie très souvent l’actualité sur ma page personnelle, en me laissant aller vers l’interrogation critique, et comme tout le monde, avancer quelques opinions sur la politique…  Les Live de Souleymane est ma page où des invités donnent leurs avis sur diverses thématiques. Les directs sont un moment de militantisme ou de débats, d’échanges. Quant à la situation politique après les élections législatives de mai 2023, on remarque une nouvelle configuration. Cette nouvelle configuration politique est le résultat de tiraillements des dernières décennies. Les grandes figures de l’opposition politique dont on ne voyait pas – à priori- une alternance au sein de leur mouvement se sont retrouvés derrière des partis naissants, nés de compromis ; même sur des bases militantes pour certains. Le pouvoir a tout de même su maintenir sa domination sur le terrain politique. La politique politicienne et le populisme ont également de beaux jours devant eux. C’est le constat. A côté, la situation socio-économique devient alarmante.  Des réformes voient le jour. Quelles sont leurs finalités ? On se demande. L’arabisation est un facteur qui contribue à la dégradation de l’école censée être républicaine. Que faire ? Pour être bref, les choses suivent leur cours. La politique qui reste le tremplin pour l’ascension se détourne de vraies questions. Les partis qui posent certaines questions essentielles en passant sous silence d’autres ou dont les dirigeants minimisent le sens des choses  ne sont pas reconnus.  Il est important de noter que ces dernières élections ont montré que le citoyen et son vote comptent. Les personnes dites d’extractions serviles ou d’ascendance servile ont manifesté leur rapport de force dans la bataille politique au sein du Guidimakha. Si les survivances idéologiques font écho dans le traitement politique au sein de l’appareil étatique, l’opposition n’en est pas indemne. Il y a une conscientisation face aux enjeux et aux défis économiques, le partage des richesses, etc., au sein des communautés mauritaniennes dont celle haratine longtemps délaissée.

● Question 7 : Sur le cas du Sénégal, nos voisins, durent des remous sociaux et politiques autour de l’opposant Ousmane Sonko du Pastef (dissous récemment), en tant qu’observateur que se joue réellement entre l’actuel régime et le camp Sonko ?

SS : Tout d’abord, il faut souligner ma proximité avec certains cadres du parti des patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef). Disons que la plupart des membres de Pastef sont plus dans le militantisme que dans les calculs politiques. Ils sont dans une logique de construire le Sénégal qui selon la vision de Felwine Sarr ainsi que d’autres intellectuels est entrain de perdre ses acquis démocratiques. Ces «remous» partent de l’expression de la volonté de l’actuel président de réduire l’opposition à sa simple expression». Ce type de pensée est connu des chefs d’Etats dans les démocratures. On remarque l’instrumentalisation de la justice, des arrestations arbitraires, des femmes séparées de leurs nourrissons,des hommes torturés, des personnes qui optent pour le silence dans une atmosphère de tension politique où toute cette brutalité est dirigée vers les Patriotes et leur président arrêté. La question du troisième mandat est écartée, le pouvoir en laissant cette opposition faire campagne risque de se retrouver devant les tribunaux. Quelques personnes de l’administration, juges, etc., refusent de céder à des manœuvres politiques qui ne disent pas leurs noms. Ce qui m’impressionne, au Sénégal, deux membres d’une même famille peuvent être de bords politiques différents, tout en étant dévoués. Cela montre la maturité politique des sénégalais. Tout de même, quel que soit celui qui présidera aux destinées du Sénégal, il aura pour premier objectif politique de décrisper la scène politique.

● Question 8 : En quelques mots, quelle substance en matière de réflexion donnez-vous comme définition au panafricanisme aujourd’hui ?

SS : Le panafricanisme est un mouvement politique et idéologique qui va de l’histoire africaine (esclavages, colonisation…), de la lutte pour l’indépendance, de la philosophie africaine, culture, et tant d’autres choses pour mettre en avant une unité africaine. Cette idéologie s’attaque de prime abord à l’impérialisme économique et au néocolonialisme, de nos jours. Je conseille un enregistrement avec Dr Amzat  sur ma page les Live de Souleymane Sidibé intitulé : Le panafricanisme à l’ère du numérique. Il est historien spécialiste du panafricanisme.

~Réalisé par KS pour le BLOG

● Communiqué de presse Hommage à la présidente Fatimata Mbaye – [IRA-Mauritanie]

Initiative de Résurgence Abolitionniste(IRA)

Communiqué de presse
Hommage à la présidente Fatimata Mbaye

Initiative de Résurgence Abolitionniste (IRA) se félicite et félicite les organisations et activistes des droits de l’Homme en Mauritanie à l’occasion de la nomination de la présidente Fatimata Mbaye à l’occasion de sa nomination par le secrétaire général des Nations-Unies comme membre du Conseil d’administration du fonds des contributions volontaires des Nations-Unies sur les formes contemporaines d’esclavage. IRA souhaite beaucoup de succès à maître Fatimata Mbaye, défenseuse déterminée, pleine de constance et d’abnégation contre des différentes et multiples violations des droits et dignité de personnes en Mauritanie. La présidente de l’AMDH (Association Mauritanienne des Droits de l’Homme) a été non sans courage et désintéressement total, avec toutes les victimes dont les nombreuses vagues de détenus d’opinion parmi les rangs de l’ONG IRA au fil des années.
Nous remercions vivement les différentes instances des Nations-Unies dont le secrétaire général, de cette reconnaissance très largement méritée.

Nouakchott, 10 octobre 2023

La commission de la communication

● Le Grand Entretien du Blog | Notre invité est Coulibaby Papa Hamady alias Yimbi kumma

La rubrique Grand Entretien du Blog (Le GEB) de votre Blog vous propose une interview spéciale avec l’artiste mauritanien originaire de la ville de Selibaby (Guidimagha). Il s’agit de monsieur Coulibaby Papa Hamady connu sous le surnom Rappeur Yimbi kumma . Très investi dans l’environnement musical, il nous livre gentiment son portrait d’acteur multidimensionnel. Nos remerciements à lui pour sa disponibilité pour cet entretien.

Vous pouvez découvrir et suivre ses activités à travers son site internet https://www.yimbikumma.com .

Ci-dessous ses réponses à nos 6 questions de l’entretien :



● Question 1 : Bonjour monsieur Coulibaby Papa Hamady, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Papa Hamady Coulibaby : je m’identifie comme un homme aux multiples casquettes. Sur le plan professionnel, je suis un artiste, producteur, manager et consultant en musique business et marketing numérique. Mon parcours m’a permis d’explorer divers aspects de l’industrie musicale, que ce soit en créant de la musique, en la produisant, ou en aidant d’autres artistes à naviguer dans ce domaine en constante évolution.

Ma passion pour la musique s’est toujours accompagnée d’un engagement profond envers les droits de l’homme et les questions sociales. En tant qu’activiste, je m’efforce de promouvoir l’égalité, la justice et le respect des droits fondamentaux pour tous les individus. Je crois fermement que la musique peut être un moyen puissant pour sensibiliser et inspirer le changement social.

Mon parcours professionnel et mon engagement personnel se rejoignent dans mon travail en tant que consultant, où j’aide les artistes et les professionnels de l’industrie musicale à développer leurs carrières et à utiliser les outils numériques pour atteindre un public plus large.


● Question 2 : Vous êtes connu dans le paysage Rap mauritanien sous le surnom Yimbi kumma, originellement quel fut l’élément inspirateur qui vous a mené à ce mouvement musical ?

PHC : En effet, je suis connu sous le surnom de Yimbi Kumma, ce qui signifie en français « feu et flamme. » Cette appellation a une signification profonde pour moi, et elle est étroitement liée à l’élément qui m’a inspiré à m’engager dans le mouvement musical rap en Mauritanie.

Mon inspiration est née de l’obscurantisme qui caractérise parfois notre communauté. J’ai observé que nous vivons dans un environnement où de nombreuses réalités sont occultées, où les problèmes et les injustices restent souvent invisibles. Je me suis dit que nous vivions dans un endroit « noir » au sens figuré, où les gens ne parvenaient pas à voir devant eux, à percevoir les problèmes qui les entourent.

Le nom « Yimbi Kumma » est né de cette idée. Mon objectif était d’apporter de la lumière, de la clarté, et de faire en sorte que les gens puissent enfin « voir » la réalité de leur situation. Je voulais qu’ils prennent conscience des erreurs et des inégalités qui existent dans notre communauté, et je croyais fermement en la puissance de la musique, en particulier du rap, pour transmettre ce message de manière forte et percutante.

En somme, mon nom artistique, Yimbi Kumma, symbolise mon désir de briser l’obscurité, de révéler la vérité, et d’inspirer le changement au sein de notre société mauritanienne en éclairant les esprits grâce à ma musique.

● Question 3 : si vous deviez faire un bilan de votre carrière, quels sont les moments forts et les thématiques clés abordées que vous citerez en priorité ?

PHC : Si je devais faire un bilan de ma carrière, il y a eu de nombreux moments forts, chacun avec sa signification particulière. Cependant, je vais mettre en avant trois moments clés qui ont marqué ma trajectoire artistique.

Le premier moment fort qui me vient à l’esprit est l’arrivée de la radio jeunesse, où la communauté soninké a eu l’occasion de me découvrir. C’était une période cruciale où ma musique a commencé à toucher un public plus large, et cela a été une expérience très gratifiante.

Le deuxième moment fort a été lorsque j’ai réussi à me faire une place au niveau national. À l’époque, c’était un défi de taille, car je venais de la région de Guidimakha, et les rappeurs des régions n’étaient pas toujours reconnus à Nouakchott. Cela a exigé beaucoup de courage et de détermination pour m’imposer dans le paysage musical mauritanien. Je tiens à exprimer ma gratitude à mon ami Monza, qui m’a toujours soutenu et tendu la main quand j’en avais besoin. Son soutien a été essentiel.

Le troisième moment fort que je souhaite mettre en avant a été la rencontre avec mon public lors de la tournée des vacances de 2009. Cette tournée a été inoubliable pour moi, car elle m’a permis de connecter directement avec mes fans et de ressentir leur enthousiasme et leur soutien de manière tangible.

Ces moments forts ont contribué à façonner ma carrière et à renforcer ma détermination à poursuivre ma passion pour la musique. Chacun d’entre eux représente une étape importante de mon parcours, et je suis reconnaissant envers tous ceux qui m’ont soutenu tout au long de cette aventure musicale. »

● Question 4 : le Rap rime souvent avec éveil de consciences sur des problématiques sociales ou politiques, en Mauritanie et dans la communauté soninké, ce rôle est-il suffisamment porté ?

PHC : Le Rap a toujours été associé à un rôle d’éveil des consciences, que ce soit sur des problématiques sociales ou politiques. Cependant, il est indéniable que l’évolution du Rap au fil des années a conduit à des changements dans la manière dont ces messages sont véhiculés.

Aujourd’hui, il est difficile de prétendre que le Rap rime fréquemment avec un éveil des consciences sur des problématiques sociales ou politiques, tant au niveau mondial que dans nos propres communautés. De nombreux rappeurs qui connaissent un succès commercial se concentrent davantage sur l’aspect divertissant de la musique, répondant ainsi à la demande d’un public qui recherche principalement de l’ambiance et de l’entertainment. Cette tendance peut parfois reléguer les messages sociaux et politiques au second plan.

Cependant, il est important de noter que certains artistes, y compris moi-même, demeurent attachés à la tradition du Rap conscient, porteur de messages forts. Nous croyons en la capacité du Rap à influencer positivement la société en abordant des questions importantes et en éveillant les consciences. Bien que cela puisse parfois signifier nager à contre-courant de la tendance générale, nous restons fidèles à notre engagement envers un Rap révolutionnaire et porteur de sens.

Il est essentiel de maintenir un équilibre entre l’art et le divertissement dans la musique Rap, et de reconnaître la diversité des voix et des approches au sein de cette communauté. Mon espoir est que le Rap continue d’évoluer en tant que moyen puissant d’expression et d’éveil des consciences, même dans un paysage musical en constante évolution. »

● Question 5 : Quel retour pouvez-vous faire sur votre engagement politique lors des élections générales en Mauritanie cette année ?

PHC : Mon engagement politique lors des élections générales en Mauritanie cette année a été plutôt inattendu et motivé par des circonstances particulières. En réalité, je n’ai pas envisagé une carrière politique à proprement parler. Pour être honnête, j’ai simplement choisi de mettre un pied dans l’arène politique pour mieux comprendre ce monde et sentir l’odeur de la politique, comme on dit.

Ma participation s’est concrétisée lorsque j’ai apporté mon soutien à mon grand frère, l’honorable député Balla Touré. Cependant, lorsque le moment est venu de désigner un candidat pour représenter la coalition Espoir Mauritanie dans la diaspora, la situation s’est complexifiée. Conformément à la législation électorale, il était convenu que si le candidat était de la communauté peulh, son suppléant devait être de la communauté soninké ou wolof, voire hassania, de préférence une femme. Par conséquent, la décision a été prise en faveur d’un candidat soninké.

Face à l’absence de femmes soninkés pour occuper cette position, et devant la difficulté de trouver un homme soninké disponible, l’équipe a finalement porté son attention sur moi. C’était une situation à laquelle nous étions confrontés, et il n’y avait pas d’autre alternative que d’accepter cette responsabilité.

Mon engagement politique, bien que survenu par défaut, m’a permis de voir de plus près les enjeux et les défis du processus électoral en Mauritanie. Cela a été une expérience instructive, et je reste ouvert à de nouvelles opportunités pour contribuer positivement à la vie politique et sociale de mon pays à l’avenir.

● Question 6 : dans la communauté soninké, une certaine jeunesse est très attirée par le champ du Rap, étant expérimenté du milieu, quels conseils et alertes pouvez-vous émettre à propos ?

PHC : Il est vrai que le Rap peut être une source d’attraction puissante pour la jeunesse, y compris au sein de la communauté soninké. Ayant moi-même une expérience dans ce domaine, j’aimerais partager quelques conseils et mises en garde à l’attention des jeunes qui souhaitent se lancer dans le Rap.

Tout d’abord, il est important de comprendre que le Rap a des racines historiques qui peuvent être associées à des contextes urbains difficiles et à la culture « gangster ». Cependant, le Rap est avant tout un moyen d’expression artistique, et il ne faut pas confondre le style musical avec des comportements délictueux. Le succès dans le Rap repose souvent sur la discipline, la créativité et le travail acharné.

✍️🏿Entretien réalisé par KS pour le BLOG

● Pacte RFD-UFP-INSAF, prolonger le mandat de Ghazouani jusqu’en 2033 | L’interview au Journal L’Authentique

Le Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) et l’Union des Forces du Progrès (UFP) ont signé avec le parti au pouvoir INSAF, un pacte qui aurait été validé par le président Ghazouani. Il prévoit dans ces grandes lignes un septennat à partir de 2026, selon des échos parvenus à Birame Dah Abeid, député et président du mouvement IRA qui a bien voulu nous accorder cette interview autour de cet accord.

Dans l’entretien qui suit, le président de l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), Birame Dah Abeid, député et deux fois dauphin aux présidentielles de 2014 et 2019, revient sur l’accord signé entre le parti au pouvoir, INSAF, et deux parmi les partis d’opposition les plus emblématiques du pays, le RFD et l’UFP.

L’Authentique : quels sont les principaux points que vous avez relevés dans le pacte signé entre le RFD, l’UFP et INSAF ?

Birame Dah Abeid : les principaux points que j’ai relevés dans ce pacte validé par le Président Mohamed Cheikh Ghazouani, signé entre le RFD, l’UFP et le parti INSAF, c’est qu’il n’y a rien de nouveau par rapport à la rhétorique des partis convenants, qui représentent en réalité les milieux proches du pouvoir et dont l’objectif est le maintien de ce dernier. C’est presque une rhétorique de laudateurs qui magnifient ce qui n’existe pas et qui s’en prennent à des boucs émissaires, des forces intérieures qui sont taxés d’ennemis de la paix. Il s’agit d’une vieille rengaine aussi vieille que cette démarche initiée par ces laudateurs, qui pour les besoins du moment, se sont transformés en chasseurs de primes. Déjà, un haut cadre du RFD vient d’être nommé dans un poste de sinécure et un autre, cadre à l’UFP, empêtré dans une sordide affaire vient de voir son calvaire terminé.

C’est étonnant que cette plateforme puisse déclarer que le président Ghazouani a satisfait toutes les doléances de l’opposition. Parce que je n’en connais pas une. Au contraire, il a fait des promesses alléchantes qui ont envoûté le peuple mauritanien, mais il s’est avéré que c’est quelqu’un qui ne tient pas sa parole.

D’autre part, j’ai pu lire dans ce document qu’il y a des forces intérieures qui menacent la stabilité et que l’opposition « clairvoyante » doit s’arrimer au pouvoir pour défendre la paix civile et l’unité nationale. Je me demande qu’elle est cette « opposition clairvoyante » et qui décide de la clairvoyance ou non de telle ou telle opposition.

L’Authentique : est-ce que ces accords engagent l’opposition ?

Birame Dah Abeid : non pas du tout. C’est une charte qui engage l’opposition chauvine, l’opposition dans le système, pour être plus précis, l’opposition beidane chauvine qui est à l’image du ministre de l’Intérieur, Mohamed Ahmed Mohamed Lemine dit Ould Lehweirzi qui avait déjà dit que l’opposition naturelle doit être celle du RFD et de l’UFP, une opposition maure bon teint et bien née. Selon lui, la plèbe constituée des Harratines et des Négros mauritaniens ne mériterait pas d’y figurer.

L’Authentique : aujourd’hui, l’UFP et le RFD, eu égard à leur représentativité politique, peuvent-ils négocier au nom de toute l’opposition ?

Birame Dah Abeid : c’est en réalité paradoxal puisque le RFD et l’UFP dans leur coalition présidentielle de 2019 n’ont obtenu que 2% des voix. Ils sont à la queue, totalement laminés. Lors des élections locales de mai 2023, municipalités, régionales et législatives, ces deux partis n’ont également rien récolté et ils ont été complètement effacés du parlement, des mairies et des conseils régionaux. Il est ainsi étonnant que le pouvoir puisse s’appuyer sur une opposition en désuétude. C’est une manœuvre des milieux chauvins qui cherchent à contrer l’opposition antisystème, droits de l’hommiste, populaire et sociale qui est matérialisée par le RAG/IRA, le FPC, la CVE, le FRUD, etc. Mais aussi par autant de mouvements formés par de jeunes maures qui s’activent sur la scène politique et s’opposent à la gouvernance actuelle.

J’ai vu aussi entre les lignes dans cette charte raciste et exclusiviste, que l’objet réel de la charte reste encore caché, qu’elle relève du domaine du non-dit et du secret. On m’aurait dit que le pouvoir veut procéder à un saupoudrage et passer un vernis sur la constitution, en connivence avec le RFD et l’UFP. L’idée est de rajeunir le pouvoir pour qu’il reprenne une nouvelle virginité, afin que le parti INSAF dans son dialogue avec ces deux partis, puisse repousser les prochaines élections présidentielles de 2024, pour 2026, qu’il puisse reprendre les élections générales locales afin de permettre à l’UFP et au RFD de revenir au parlement ainsi que dans les conseils municipaux et régionaux.

Ainsi, dans ce plan, la Constitution sera tripatouillée avec un nouveau mandat de 7 ans qui permettra à Ghazouani de faire deux septennats. Donc, de 2026 à 2033, plus son actuel mandat. Il s’agirait ainsi, avec le temps, d’emménager une porte de sortie à Ghazouani pour lui éviter le sort de son ancien ami, Mohamed Abdel Aziz.

Pour mener à bien cette machiavélique feuille de route, le pouvoir a ainsi besoin de la caution d’une opposition qui accepte de jouer le jeu, comme le RFD et l’UFP. Un bon alibi pour le pouvoir qui peut se targuer d’être accompagné dans cette « réforme » par deux partis historiques, tant bien même qu’ils n’ont plus d’électorat.

L’Authentique : quelle est actuellement la réaction de l’autre opposition ?

Birame Dah Abeid : tous les partis de l’opposition antisystème, les FPC, le FRUD, RAG, entre autres, se sont vigoureusement prononcés contre ce pacte. Nous pensons que c’est une manœuvre visant à semer la diversion au sein de l’opinion publique nationale et internationale ainsi qu’au sein de la classe politique. Tout cela montre en réalité que le parti INSAF est acculé, ce qui l’oblige à se tourner vers des alliances monocolores de partis maures pour contrer la montée menaçante des laisser pour compte, que cela soit les Harratines, les Négro-mauritaniens, mais aussi une écrasante majorité de la jeunesse maure qui a constaté qu’on lui a toujours agité au nez depuis toutes ces décennies la peur du péril noir harratine sous les différents régimes qui se sont succédés. Cette jeunesse maure consciente tient aujourd’hui à prendre le taureau par les cornes et s’oppose systématiquement à ce pouvoir.

Au niveau de l’opposition, nous allons nous concerter pour nous opposer à cette tentative de conservation du pouvoir, d’autant plus que ce plan s’il se réalise va creuser le fossé entre les communautés, entre le pouvoir et la jeunesse maure qui était massivement représentée au sein de l’UFP et du RFD et qui a pris son indépendance en ralliant des partis comme le FRUD, ou des mouvements comme KAVANA, connus pour leur verve contestataire et qui font tout pour marquer leur opposition au système actuel.

Il faut impérativement annihiler cette tentative de reproduire l’actuel pouvoir sous un faux habillage et dans une alliance avec une fausse opposition. Nous allons commencer dès à présent à constituer un front de résistance. J’en ai déjà parlé à Samba Thiam, président des FPC, mais aussi au parti FRUD et nous allons élargir le cercle des concertations.

Propos recueillis par CHEIKH AIDARA

©️ Source en lien https://aidara.mondoblog.org/2023/08/26/pacte-rfd-ufp-insaf-prolonger-le-mandat-de-ghazouani-jusquen-2033/?fbclid=IwAR1V_UyHTBdyyq6vOdnHFlpxov90NcnpLGLOKcTaHTRR7wtzY6WDcPYMXoQ

● Le Grand Entretien du Blog | Avec l’honorable député Khally Mamadou Diallo

La rubrique Le Grand Entretien du Blog (Le GEB) vous propose une interview exclusive avec un jeune mauritanien très connu dans dans l’écosystème médiatico-humanitaro-politique dans son pays. Élu à l’assemblée nationale sous les couleurs de la Coalition Espoir Mauritanie lors des élections générales passées (Mai 2023), l’honorable député Khally Mamadou Diallo répond à nos questions soumises dans cet entretien. Le « lanceur d’alertes » dispose d’une voix de réseautage quasiment viral en prenant partie publiquement pour dénoncer, révéler et interpeller les pouvoirs publics sur différents manquements et dysfonctionnements constatés dans tels ou tels domaines.



Question 1 : Bonjour l’honorable député monsieur Diallo, nos remerciements pour votre disponibilité, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Khally Mamadou Diallo : Merci à vous et votre organe de m’avoir choisi pour cet entretien. Je suis khally Mamadou Diallo, le député que le peuple mauritanien a porté à l’assemblée nationale pour défendre son intérêt.

Question 2 : vous étiez une figure connue à travers le champ humanitaire notamment au sein de La Marmite du Partage, qu’est-elle devenue cette institution à ce jour ?

KMD : Cette institution est devenue beaucoup plus efficace car réorientée dans le développement. Nous venons de clôturer un projet de 35 robinets pour 35 familles à dar El beyda dans le quartier « sans fiche ».
Cependant nous avons aussi changé de stratégie, moins de bruit et plus d’actions sur le terrain. L’humanitaire c’est mon ADN.

Question 3 : Lors de la présidentielle de 2019, vous avez soutenu la candidature de l’ancien premier Ould Boubacar (classé 3ème), aux élections générales de cette année (Mai 2023) vous devenez député sous les couleurs Espoir Mauritanie avec le parti Frud , que pouvez-vous nous dire sur cette expérience politique jusqu’alors?

KMD : Sidi Mohamed Ould Boubacar a été mon candidat aux élections de 2019, il était là en tant que candidat indépendant, aujourd’hui qu’il n’a plus continué le projet politique qu’il nous avait proposé. Ainsi j’ai décidé de continuer mon chemin afin de gagner davantage d’expérience politique, et c’est fascinant.

Question 4 : régulièrement vous relevez et portez devant l’opinion publique certains cas de violations des droits humains et divers dysfonctionnements, quel bilan faites-vous sommairement des différents traitements apportés par les services étatiques (administratifs, judiciaires et autres) en la matière ? Et des manquements également ?

KMD : Effectivement, car je suis quelqu’un qui est dans le camp de l’opposition au système d’exclusion mis en place. Et je reste quelqu’un de sincère dans ce combat, je pense qu’il est important de relever et poser des problèmes afin de trouver des solutions, car en réalité le peuple nous a portés à l’hémicycle pour cela.
Certains problèmes posés ont trouvé des solutions et d’autres sont sans suite.
L’essentiel est que tous les problèmes que nous avons posés sont irréfutables et sont surtout pour l’intérêt général.

Question 5 : ces derniers temps, différents indices avancent qu’il y aurait un projet d’accord politique entre les partis Rfd et Ufp (issus de l’opposition) et le principal parti du pouvoir Insaf, quelle analyse faites-vous de cette éventualité ?

KMD : J’ai appris cela comme ça dans les réseaux sociaux mais j’ai aucune information claire à propos et de toutes les façons cela ne m’engage en rien puisque je suis de la Coalition Espoir Mauritanie. Ainsi dire seuls les membres du Rfd et Ufp pourront clarifier l’opinion sur cette affaire.

Question 6 : sur les problématiques liées à l’esclavage et au féodalisme en Mauritanie, selon vous quelles seraient les stratégies nécessaires pour éradiquer efficacement ces phénomènes présents diversement dans toutes nos communautés ?

KMD : Le féodalisme et l’esclavage sont des phénomènes à combattre et la seule stratégie c’est l’application des lois, hélas nous sommes un pays spécial et fort dans la conception des lois mais jamais nous ne les appliquons et c’est regrettable.
Il faut aussi combattre ces phénomènes sans verser dans la haine et la rancune mais plutôt mettre en place une approche où toutes nos communautés participeront à l’éveil des consciences. C’est très difficile mais c’est possible d’y arriver.

Question 7 : à l’international notamment dans notre sous-région ouest-africaine, différents théâtres de crises multidimensionnelles (politiques, coups d’État, sécuritaires, migrations…) existent, quels commentaires pourriez-vous en nous faire ?

KMD : Tout cela n’est que le résultat des dictatures africaines. Le manque de considération de la jeunesse, l’absence des libertés d’expression, l’absence de perspectives concrètes, sont autant de facteurs qui font que l’Afrique bouge dans des sens interdits.
De principe je suis contre toute forme de coups d’État, nos pays ont besoin de stabilité et cela ne peut être obtenu que dans la paix et la démocratie.

Question 8 : un grand nombre de la jeunesse mauritanienne quitte ou ambitionne à quitter le pays vers les États-Unis, quelle analyse faites-vous sur ce phénomène migratoire ?

KMD : C’est une preuve de l’échec de notre gouvernement.
Notre jeunesse fuit notre pays car elle est marginalisée, malmenée et sans considération. Par conséquent cela crée des frustrations et donc pousse la jeunesse à quitter, ce qui est déplorable.

Question 9 : l’élection présidentielle est prévue l’année prochaine en Mauritanie, quelles perspectives en termes de possibilités d’alternance ? Quelle formule serait idéale pour le camp de l’opposition face au pouvoir en place ?

KMD : Pour la présidentielle de 2024, je soutiens l’honorable député Maître Elid Mohameden Mbareck. Je vous remercie.

• Réalisé par KS pour le BLOG

● Le Grand Entretien du Blog | Avec monsieur N’djim Boubacar (MSDH – Mali)

La rubrique Grand Entretien du Blog (Le GEB) vous propose l’interview accordée par monsieur Boubacar N’djim. Le coordinateur national du Mouvement pour la Sauvegarde des Droits de l’Homme est un dynamique activiste dans l’arène droit-de-l’hommiste au Mali notamment l’engagement anti-esclavagiste. Il nous brosse quelques données de son militantisme et aborde l’actualité dans la sous-région ouest-africaine. Monsieur N’Djim, expert en gestion des conflits, est affilié à plusieurs structures dédiées à la défense des droits humains au Mali, comme la Coalition nationale des défenseurs des droits de l’Homme du Mali.

~ Ci-dessous ses réponses à nos questions :

Question 1 : Bonjour monsieur N’Djim Boubacar, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

BN : Je suis un jeune activiste de la societé civile et militant des droits de l’homme au Mali, je suis très connu dans la lutte contre l’esclavage par ascendance au Mali surtout dans le milieu soninké.

Question 2 : Vous êtes une voix publique droit-de-l’hommiste au Mali depuis quelques années à travers le Mouvement pour la sauvegarde des droits humains (MSDH), actuellement quelle est la situation générale en matière de droits humains dans votre pays?

BN : La situation des droits de l’homme au Mali demeure préoccupante malgré la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, qui parle de droits de l’homme parle de justice sociale selon un rapport publié le 06 Janvier 2023 par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).
L’accès des personnes déplacées à l’emploi formel peut les empêcher d’être victimes des formes contemporaines d’esclavage.
Malgré les efforts déployés pour faire avancer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, de nouvelles difficultés sont apparues après que les mouvements signataires ont décidé de suspendre leur participation au mécanisme de suivi de l’Accord jusqu’à la tenue d’une réunion avec l’équipe de médiation internationale, destinée à discuter de l’avenir du processus de paix. Alors que l’insécurité continue de compromettre le rétablissement de l’autorité de l’État, la mise en œuvre de la stratégie de stabilisation des régions du Centre reste essentielle pour remédier à la situation actuelle.
En dépit des défis complexes et multiformes il existe quelques éclaircies dans le domaine du processus de transition, dans le renforcement des capacités des Forces de Défense et de Sécurité Maliennes, la coopération face à la lutte contre le terrorisme. Tout cela semble être dissimulé par les effets d’une fracture géopolitique mondiale dont le Mali semble être l’épicentre en Afrique de l’Ouest, une situation qui génère tensions, polarisation, défiance généralisée et malsaine entre le Mali et une certaine partie de la communauté internationale et notamment la MINUSMA.

Question 3 : la lutte contre l’esclavage par ascendance fait partie de votre champ d’engagement, quelle analyse-bilan faites-vous sur cette problématique et son traitement par les autorités maliennes ?

BN : Oui effectivement la lutte contre l’esclavage fait partie de nos objectifs, Certaines personnes naissent en esclavage au Mali parce que leurs ancêtres ont été capturés comme esclaves et que leurs familles « appartiennent » aux familles propriétaires d’esclaves – appelées « nobles » – depuis des générations. Les « esclaves » sont contraints de travailler sans rémunération, peuvent être hérités et sont privés des droits humains fondamentaux.
De nos jours ce phénomène a engendré plusieurs morts et plusieurs centaines de déplacés dans la seule région de Kayes.
On se rappelle attaques à Lani dans le Gadiaga, dans le Guidhimaka, du massacre de Diandjoumé , des attaques répétitives à bafoulabé,Nioro,Diema pour ne citer qu’eux.
A la suite de ces différentes violations des droits de l’homme, une fissure s’est installée dans ces communautés qui ont vécu des siècles sans tensions et il faut aussi reconnaitre que ces faits ne sont pas nouveaux ce sont des faits très contemporains.
Il existe une couche qui se dit noble la plus part vient des chefferies et entretient ces coutumes et us légués de façon très rigoureuse.
Apres toutes ces atrocités toutes les organisations qui lutte contre l’esclavage réunies au sein de la Coalition nationale du lutte contre l’esclavage au Mali dirigé par la commission nationale de droits de l’homme ont mené plusieurs actions de sensibilisation et de plaidoyer en vue d’aider les victimes et d’alerter les autorités de transition pour que justice soit faite.
C’est en ce sens que le Ministre de la Justice a instruit aux procureurs généraux du Mali en vue de mettre fin à cette question qui tyrannise notre société.
Une session spéciale de La cour d’Assises de Kayes qui avait pour objectif de juger les infractions en lien avec la question de l’esclavage a été faite et le verdict a été sans appel pour le bonheur qui ne réclamait que justice
Sur 3 Affaires, 100 accusés, 56 détenus.
– 8 personnes condamnées à la peine de mort
-1 condamnation par contumace
-10 condamnations d’emprisonnement avec sursis
-6 condamnations à la réclusion de 5 à 10 ans d’emprisonnement
-11 condamnations allant de 2 à 5 ans d’emprisonnent
-32 acquittements
-2 arrêts civils
Ces personnes sont accusées de crimes liées à la pratique de l’esclavage par ascendance dans les régions de Kayes, Kita et Nioro.
Ceci est un effort louable de la part des autorités pour les victimes de l’esclavage par ascendance au Mali, nous félicitons également la Commission Nationale des Droits de l’Homme du Mali (CNDH) à travers son Président Mr Aguibou Bouaré et toutes les organisations de la Coalition Nationale de Lutte contre l’Esclavage au Mali (CONALEM) qui ont œuvré pour que justice soit rendue.
Par ailleurs toujours dans le cadre de la protection des victimes nous sollicitons de la part du gouvernement ;
Le retour rapide des victimes déplacées internes et de l’esclavage par ascendance ;
Et l’adoption d’une loi réprimant l’esclavage et les pratiques assimilées.
L’État est le seul garant de l’effectivité de cette justice sociale, et le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme Mr Mamadou Kassogué se sont personnellement investis pour une bonne redistribution de la justice.

Question 4 : Quelle lecture faites-vous de sa situation politico-sécuritaire globale dans notre sous-région, nombreux coups d’État (Guinée Conakry, Burkina Faso, Mali et Niger..) ?

BN : Les coups d’État militaires en Afrique de l’Ouest suscitent des préoccupations majeures en termes de stabilité politique, de démocratie, de droits de l’homme et de développement. En renversant brusquement des gouvernements élus, les coups d’État créent souvent une instabilité politique, perturbent les institutions démocratiques et génèrent un climat d’incertitude.
Ces événements contredisent les progrès démocratiques accomplis dans la région. Les principes démocratiques sont violés lorsque l’ordre constitutionnel est renversé par la force. Les impacts économiques sont également notables, avec des investissements et des échanges perturbés, entraînant des répercussions négatives sur le développement économique.
En parallèle, les coups d’État peuvent occasionner des violations des droits de l’homme, allant de la répression des libertés civiles à la censure médiatique et à l’usage excessif de la force. Les groupes marginalisés sont souvent davantage vulnérables dans ces périodes de troubles.
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et d’autres acteurs internationaux jouent un rôle crucial dans la prévention et la réaction aux coups d’État. Des pressions régionales et internationales sont exercées pour rétablir rapidement l’ordre constitutionnel.
Les raisons des coups d’État sont complexes, allant de la corruption à la mauvaise gouvernance, des inégalités sociales aux tensions ethniques. Le contexte politique et social joue un rôle central, tout comme la prolifération des armes dans certaines régions.
Chaque coup d’État est unique, mais la stabilité politique, la démocratie et le respect des droits de l’homme restent des défis constants. Des efforts soutenus sont nécessaires pour promouvoir des transitions pacifiques du pouvoir et renforcer la gouvernance démocratique dans la région.

Une partie de la population de ces pays veut de nouveaux alliés en ont marre de partenaires comme la France ou les Etats-Unis » Une partie veut de nouveaux alliés et même les Sénégalais en ont marre de partenaires comme la France ou les Etats-Unis » mais on ne peut ignorer que l’appel à une ‘voie panafricaine’ se fait de plus en plus sentir. Attendons de voir ce que cela va donner. Cependant, les crises politiques ne se résolvent pas par les armes mais par le dialogue. Des organisations comme la Cédéao et l’Union africaine, elles devraient prévenir les conflits, au lieu de cela, ils ont un pouvoir limité, étant dirigés par ces dirigeants contre lesquels les populations protestent ». Comme le président Macky Sall, qui au Sénégal est accusé de vouloir se présenter pour la troisième fois aux prochaines élections, alors même que la Constitution l’interdit. Pour mettre un terme aux coups d’État en Afrique de l’Ouest, il est essentiel d’adopter une approche globale impliquant des actions nationales, régionales et internationales.

Tout d’abord, le renforcement de la démocratie demeure une priorité majeure. Les nations doivent consolider leurs institutions démocratiques, garantir la primauté du droit et assurer des processus électoraux transparents. En promouvant des voies légales pour les changements de leadership, on réduit la tentation de recourir à des méthodes non démocratiques telles que les coups d’État.
Les dirigeants politiques jouent un rôle crucial dans la prévention des coups d’État. En adoptant un leadership éthique, en luttant contre la corruption et en protégeant les droits de l’homme, ils renforcent la confiance des citoyens dans le système politique et dissuadent les actions illégales.
Réduire les inégalités sociales et économiques est également essentiel. Une société plus inclusive, avec des opportunités équitables, diminue les frustrations qui pourraient conduire à des soulèvements et à des troubles politiques.
Une réforme des forces de sécurité est impérative. Les armées doivent être professionnelles, apolitiques et soumises à un contrôle civil rigoureux. Former les forces armées à la responsabilité, aux droits de l’homme et au respect de la constitution renforce leur rôle en tant que gardiennes de la stabilité.
Le dialogue politique est une arme puissante pour résoudre les différends politiques. Encourager les négociations et la médiation entre les différentes parties prévient les conflits qui pourraient dégénérer en coups d’État.
La médiation régionale et internationale est un pilier essentiel. Les organisations régionales comme la CEDEAO doivent jouer un rôle actif dans la prévention et la résolution des conflits. Les pressions diplomatiques et les sanctions économiques peuvent décourager les acteurs impliqués dans les coups d’État.
L’éducation civique est un investissement vital dans la prévention des coups d’État. Sensibiliser la population aux valeurs démocratiques, aux droits de l’homme et aux méthodes pacifiques de résolution des conflits favorise une culture de la paix.
Le renforcement économique est un rempart contre l’instabilité politique. Promouvoir un développement durable et la création d’emplois réduit les tensions socio-économiques qui peuvent alimenter les troubles politiques.
Le soutien aux médias indépendants est crucial. Les médias libres jouent un rôle crucial en surveillant le pouvoir et en informant les citoyens. Protéger leur liberté est une garantie contre les abus de pouvoir.
Enfin, la promotion de la stabilité régionale est essentielle. La coopération entre les pays pour résoudre les conflits transfrontaliers et promouvoir la paix est un élément clé dans la prévention des coups d’État.
En somme, mettre un terme aux coups d’État en Afrique de l’Ouest nécessite une approche à long terme, impliquant un engagement résolu en faveur de la démocratie, des droits de l’homme et de la stabilité économique, à la fois aux niveaux national, régional et international.

✍️🏿 Réalisé par KS pour le BLOG

● Le Grand Entretien du Blog | Avec l’étudiant en philosophie Bacary Cissé

~~~La rubrique Le Grand Entretien du Blog vous propose une interview avec notre jeune compatriote Monsieur Bacary Cissé. Actuellement étudiant en philosophie en Algérie, il nous expose ses analyses en réponse à nos questions. Membre actif de l’association Mohamed Askia Touré, monsieur Cissé est originaire du Guidimagha mauritanien, du village de Hassi Baghra. Notre reconnaissance à lui pour la disponibilité.

Ci-dessous l’intégralité de l’entretien :

● Question 1 : Bonjour monsieur Cissé, nos remerciements pour votre disponibilité, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?


Bacary Cissé : D’emblée, je vous remercie de m’avoir honoré en me donnant l’occasion pour exprimer mes avis sur certaines de vos questions.
Pour faire simple, je suis Muhamad Bacary Cissé ou Bacary Cissé les deux noms sont valables, mauritanien originaire de Guidimagha, village Hasse Baghra, étudiant en études supérieures, en Algérie, spécialité : philosophie.

● Question 2 : Vous êtes un membre actif de l’association Mohamed Askia Touré en Mauritanie, quelle a été la genèse de cette structure? Et aussi quels sont ses objectifs fondamentaux ?

BC : Muhamad Askia Touré est une association des jeunes, créée à partir de plusieurs facteurs, mais la principale motivation était la veille sur la société car nous appartenons à d’autres organismes actifs et nous avons des connaissances et des amis issus d’autres segments membres des associations qui sont au service de leurs sociétés, et nous avons pensé : pourquoi ne pas en faire autant pour la nôtre !
Le but principal de cette association est d’agir à travers trois volets essentiels : la « prédication » compte tenu du fait que la réforme religieuse est l’une des réformes sociales les plus importantes, car si notre religion se porte bien, le reste sera bien.
Le volet « culture » parce que la culture est la figure saillante de chaque société et c’est par la culture que les sociétés se distinguent les unes des autres, raison pour laquelle nous travaillons à faire connaître notre culture qu’est le symbole d’unité sociale mais également à y veiller sans pour autant renfermer sur nous-mêmes vis-à-vis des autres culture, loin de là, nous en prenons ce qui nous sert.
Et enfin le volet « action caritative » c’est-à-dire faire office de médiation entre d’une part, ceux qui sont privilégiés, et d’autre part, ceux qui sont défavorisés.


● Question 3 : La Mauritanie vient de clore une échéance des élections générales (municipales, régionales et législatives), quel commentaire-bilan faites-vous en tant qu’observateur et acteur indirect ?

BC : C’est vrai malgré la nette amélioration que l’on pourrait compter parmi les points positifs de ces dernières élections, sauf que ça a créé une grande polémique chez l’opinion nationale à cause de violations qui ont eu lieu au cours du scrutin et les opérations de falsification dont les résultats ont été contestés. En effet, nous avons suivi la marche de l’opposition pour contester ces résultats, de la même manière que le scrutin a été refait dans six bureaux dans le département de Mbout au niveau de la région Gorgol. Tous ces éléments montrent la non transparence de ces élections. En outre, il n’y a pas un grand espoir de changement dans cette situation, c’est une réalité que j’avais espéré et sur laquelle j’ai écrit un article publié sur le site « akhbar info » dans la foulée de ces élections.

● Question 4 : Ces dernières années, la communauté sooninké vit beaucoup de frictions sociales liées à l’organisation intra-communautaire (féodalisme, discriminations…) et au phénomène de l’esclavage statutaire, comme jeune sooninké lettré en phase universitaire, quelles sont vos réflexions à propos ? Et éventuellement vos visions et solutions d’avenir pour plus d’entente sociale ?

BC : La situation actuelle ou telle que j’appelle « la crise sociale soninké » est une question très complexe qui exige de nous une certaine précaution et de la profondeur. Avec tous mes respects pour toutes les tentatives entreprises jusqu’ici pour y mettre fin, à mon avis, elles ne sont pas suffisantes, que ça soit pour celui qui regarde sous l’angle de la religion seulement. Parce que c’est une question qui contient plusieurs domaines « religieux, social, historique et même économique »
Ni celui qui se révolte contre le social traditionnel avec des moyens inappropriés tels que l’insulte, le dénigrement et souvent avec la violence physique, ni les défenseurs du système ne peuvent résoudre la crise. Ensuite, ma claire position telle que j’ai l’ai écrite est que le changement est inévitable car il s’impose de lui-même, mais est-ce que cela est positif ou négatif ? C’est là que réside le problème et nous ne sommes que devant options : négative parce qu’on a imposé sur la société un changement dans l’anarchie sans une préparation et cela peut faire la victoire de l’une des parties au détriment de l’autre « les conservateurs et révolutionnaires » ensuite on crée un nouveau modèle selon l’intérêt de la partie vainqueur.
L’autre option qui est positive, est qu’il ait un accord social pour moderniser le système social, de telle sorte que, la réalité montre l’incompatibilité de l’ancien système avec le temps, imagine que ce monde qui est perpétuel changement, et que la société demeure cramponnée sur modèle social remonte aux siècles, si tu lis par exemple certains écrits sur l’histoire ancienne de notre société depuis le Royaume de Wagadou jusqu’à aujourd’hui, tu saura que c’est le système aristocratique, et j’avais comparé les deux systèmes, l’ancien et le nouveau, en m’appuyant sur les travaux du professeur Ali Cissé sur la société soninké, mes analyses en sont arrivées en une conclusion : c’est que la différence entre l’aristocratie du Wagadou et celui en vigueur actuellement est seulement historique et social, mais l’architecture est la même. Par conséquent, la solution telle que je la conçoit, consiste à ce que les différentes forces fassent de concertations intensives pour mettre en place un nouveau pacte en vue de moderniser le système de la société. Et le temps cette interview ne me permet pas de parler de tous les détails que j’aurais voulu détailler.

Question 5 : Concernant l’éducation, beaucoup d’initiatives sont prises au sein de communautés villageoises sooninké du Guidimagha (système hybride Mahadra- école) en dehors du cadre de l’enseignement étatique, vous y voyez quoi en terme d’inconvénients et d’avantages ? Et quel regard portez-vous sur l’éducation des jeunes filles dans nos communautés ? Et vos préconisations éventuelles en la matière ?

BC : Nul doute que les écoles religieuses jouent un rôle très important dans la revivication de l’enseignement dans la région en comblant la faible prestation de l’école publique, et grâce à ces écoles le niveau de beaucoup jeunes apprenants filles comme garçons s’est amélioré au moins sur le plan religieux, mais elles souffrent de défauts qui se situent tant au niveau pédagogique qu’au niveau de d’enseignement, de telle sorte que, certaines d’entre elles pour ne pas dire beaucoup, ne s’intéressent beaucoup pas au programme officiel que le ministre en charge de l’enseignement donne aux sciences appliquées et les langues vivantes tel le français et l’anglais. Ceci constitue un obstacle à l’avancement des élèves, de telle sorte, qu’il leur sera difficile d’être performants dans les examens nationaux en particulier l’examen de fin d’études moyennes sans parler du baccalauréat, car la plupart de ces écoles viennent à peine d’être créés dont les salles n’atteignent le niveau du secondaire.
Au niveau du volet de l’enseignement le problème est qu’il est rare de trouver parmi les enseignants celui qui a subit une formation ou qui a une expérience dans le domaine de l’enseignement, il est de trouver faible le niveau de certains académiquement parlant. Telles sont les défaillances des écoles religieuses.
Il est regrettable que la scolarisation des filles est faible comparativement avec les autres sociétés avec qui nous partageons le pays, cela est lié au fait que la femme soninké n’a pas évolué dans le domaine des études et de la culture et s’y ajoute la non évolution de la société de façon complète parce que « la mère est une école » la femme est la moitié de la société comme on le dit. Et il y a un autre problème en ce sens que la plupart des filles soninké scolarisée ne sont pas sérieuses en ce concerne les études, c’est-à-dire qu’elles ne regardent pas les études comme un sauvetage et une garantie noble pour l’homme, mais comme une étape transitoire ou comme une mode, de telle sorte, la majorité d’entre elles croient que le mariage est la garantie de leur avenir et non les études, c’est raison pour laquelle beaucoup font des efforts pour trouver un homme aisé pour construire avec lui un avenir radieux.

Concernant les recommandations : c’est que nous tous, hommes et femmes, Si on ne croit pas aux études et n’y accorde pas attention, on ne peut espérer un changement pour notre situation et trouver une solution à nos crises, on peut être riches mais cela ne peut résoudre nos problèmes et changer nos situations en rien. L’argent peut te construire un château mais non un esprit qui réfléchit.

En conclusion : je vous renouvelle mes remerciements et à la prochaine.

Réalisé par KS pour le BLOG

● Moussa Ould Khairy, Président de FC Tevragh Zeina à RimSport.net – ENTRETIEN

Rimsport – « Au-delà des polémiques et des contestations contre les arbitres (…) C’est surtout la dimension symbolique du fair-play qui devait être préservée ( …) »

Dans une interview exclusive accordée à RimSport.net, M.Moussa Ould Khaïry, président de FC Tevragh Zeïna dénonce la partialité des arbitres lors des chocs face au FC Nouadhibou et remet en cause le choix de Medjiba au sein du département arbitrage. Dans la foulée, Moussa Ould Khaïry précise qu’Ahmed Ould Yahya et lui ne sont pas des « ennemis » mais sont « opposés dans les idées ».

Prônant une révision des règles régissant l’élection du président de la FFRIM, l’ex vice président de la fédération recommande enfin aux sélectionneurs nationaux de prêter attention aux joueurs locaux.

RimSport.net : La prestation du quatuor féminin lors du classico ayant opposé FC Tevragh Zeïna au FC Nouadhibou a soulevé une vive polémique qui a enflé suite au quart de finale de la Coupe du président. Au FC Tevragh Zeïna, on continue de ruminer une grosse colère contre non seulement le quatuor mais aussi contre l’arbitre international Dahane Beïda en jugeant partiale leur prestation. Au delà de la défaite amère face à votre grand rival, que reprochez-vous aux officiels de ces deux rencontres ?

Moussa Khairy : Je remercie votre site pour les efforts qu’il fournit pour renseigner, informer et accompagner le développement du sport sur le plan national et particulièrement le football. Pour revenir à votre question, en vingt ans de Présidence de clubs, je n’ai jamais parlé publiquement de l’arbitrage, considérant qu’il est facile de taper sur les arbitres pour une équipe perdante. Je pesais toujours le pour et le contre parce qu’en définitive l’arbitre est une personne et peut commettre des erreurs. Seulement cette fois-ci le vase a réellement débordé et c’est trop. J’estime que la gestion arbitrale de notre rencontre avec le FC Nouadhibou a été catastrophique.

Voyez-vous, s’il s’agissait d’une faute ou deux, on serait peut-être dans le doute au bénéfice des arbitres. Malheureusement pour les arbitres (un quatuor féminin), il s’agit de quatre fautes, dont deux à l’origine des deux buts de FC Nouadhibou. Une faute au départ sur notre latéral gauche, Demba Traoré, qu’elles ont omis de siffler. Plus loin, une faute imaginaire, presque dans notre surface de réparation et transformée en but par FC Nouadhiboun. Le deuxième forfait commis, un hors-jeu clair et net. Tous les spectateurs présents ce jour là vous le diront. Un but honteux accordé à FC Nouadhibou. Les faits sont têtus. In- fine, deux penaltys non sifflés en notre faveur. Ce ne sont pas des allégations, ce sont des faits réels. Les vidéos sont disponibles et à votre disposition.

Au-delà des polémiques et des contestations contre les arbitres, on doit se dire la vérité. Il ne s’agit pas du résultat d’un match, même si en vérité, FC Nouadhibou n’avait pas besoin de ça pour finir en tête du championnat. Elle allait l’être de toute façon, vu l’avantage en termes de points engrangés au cours du marathon saisonnier. C’est surtout la dimension symbolique du fair-play qui devait être préservée. Il s’agit du labeur de tout un groupe, entraîneurs, joueurs et dirigeants qui se battent et se défoncent, financent beaucoup d’argent, pour compétir. C’est ça qui a été balayé par des fautes graves d’arbitrage.

Pourtant, il ne s’agit que d’un jeu et cela devait rester un jeu à ne pas pervertir. Dévoyer tout ça pour l’intérêt d’une équipe, de la part d’arbitres censés être au service du sport, c’est décevant. Je ne suis pas le dernier venu et je sais comment fonctionne l’arbitrage sur le plan continental et local.

Tout ça pour vous dire que je suis très gêné qu’il s’agisse ici d’un quatuor féminin. Cependant, je dénonce avec la dernière énergie ce genre de fautes graves qui ont une incidence directe sur les résultats que nos jeunes sont en droit d’attendre après tant d’efforts, de travail et de préparation. Seul le mérite devrait prévaloir. La triche et le détournement des résultats sont des actes frustrants, surtout pour des jeunes qui ont travaillé dur. Nous sommes censés leur inculquer les valeurs d’honnêteté, d’abnégation, de don de soi et la récompense à la sortie. C’est justement le rôle de tout arbitre de veiller au strict respect des règlements qui régissent le football. Il y va de leur honneur et de leur réputation, car l’histoire est en fin de compte le Grand Arbitre. C’est elle qui sépare les bonnes graines de l’ivraie.

Chassez le naturel !

Décidément quand vous jouez contre FC Nouadhibou vous jouez contre les arbitres aussi. La preuve que l’on nous refait le même coup de la semaine passée cette fois en quart de finale de la coupe nationale avec un penalty flagrant refusé par un soit disant arbitre international ! Et, comme le dit si bien un adage bien de chez nous que  » Quand le cri vient de la montagne où faut-il fuir « ?

J’appelle les présidents des clubs à se mobiliser massivement contre ce genre de pratiques avec lesquelles il ne sert à rien de continuer à compétir.

Pensez-vous que les arbitres sont « instruits » contre FC Tevragh Zeina ?

Je n’irai pas jusqu’à là. Toutefois, par rapport à ce match les faits sont clairs et nets pour tout le monde. J’ajoute que les contestations de l’arbitrage sont monnaie courante pour toutes les équipes quand il s’agit d’un match contre F C Nouadhibou. A partir de là vous pouvez vous faire votre propre idée ?

Depuis l’arrivée à la tête du département arbitrage de Rachid Medjiba, certains arbitres sont sans cesse mis à la touche par ledit département sans que des faits quelconques leur soient reprochés. Les protestations ne cessent de pleuvoir contre le premier responsable pour sa gestion laxiste voire douteuse. Qu’est ce que cela vous inspire ? Comment évaluez-vous la gestion actuelle des arbitres?

Parlons-en. Monsieur Rachid Medjiba est un ancien arbitre algérien dont la carrière n’est pas des plus reluisantes et j’ai du mal à comprendre comme beaucoup de responsables à comprendre que l’on l’appelle pour superviser l’arbitrage dans notre pays. Déjà pour moi, Il s’agit d’un manque de respect pour les grands noms de l’arbitrage dans notre qui sont légion et qui ont fait leurs preuves. On citer Idrissa Sarr, Lemghaivri, Moussa Seck, Sow, Abeidi, Mountaga, Lemghambodj et bien d’autres. Pourquoi ne pas faire appel à eux au lieu d’un étranger déconnecté des réalités de notre pays et objet de suspicion. BIZARRE… C’est tout simplement incompréhensible surtout que depuis sa désignation à la tête de cette commission les contestations n’ont jamais cessé. Je considère que c’est du mépris qui s’ajoute à l’ignorance totale de la Fédération pour les compétences nationales dans d’autres domaines.

Selon vous, les règlements régissant l’élection du président de la FFRIM doivent-ils être maintenus ou révisés ?

Ecoutez, il s’agit d’une question pertinente et intéressante. Dites-moi est ce que quelqu’un était capable de se présenter pour la présidence de la Fédération Mauritanienne de Football. Je vous dirais sans détour NON. Pourquoi? C’est tout simple parce que le président actuel de la fédération, lors de la fameuse réunion de la honte des présidents de ligues régionales à Kiffa a fait signer un papier leur interdisant de mandater tout autre candidat que lui. Alors vous comprenez certainement mieux pourquoi personne ne s’est présenté contre lui. Dans tous les pays du monde, les élections sont ouvertes à tous les citoyens et même les présidentielles. C’est vous dire que l’alternance permet d’éviter l’usure du pouvoir et c’est le cas de la fédération actuelle.

Pour revenir à votre question, les textes régissant l’élection du Président de la Fédération Mauritanienne de Football doivent être révisés parce qu’ils sont cadenacés et ne permettent d’élections démocratiques. Les voix des clubs de deuxième division et même de troisième division doivent leur être restitués parce que ce sont des acteurs du football et ne doivent pas être mis à l’écart de la gestion du football. Ce sont là des vérités que certains ne veulent pas entendre… mais la santé du football dans notre pays en dépend ainsi qu’une alternance saine.

En décembre dernier, dix clubs de Super D1 sur les quatorze avaient désapprouvé la décision de la Ligue nationale d’arrêter unilatéralement le championnat. Écœurés depuis un certain temps, les clubs avaient exprimé leur raz le bol dans une correspondance adressée au président de la FFRIM en se plaignant de la manière dont le championnat de la Super D1 est géré actuellement. Que leur reprochez-vous ? Quelles propositions formulez-vous ?

Vous savez ce sont les clubs qui disputent le championnat pour faire évoluer notre football. Notre protestation devant la décision de la ligue nationale était une manière de montrer à la fédération que le football ne peut pas exister sans les clubs. Nous avons protesté contre les décisions unilatérales qui nous engagent et qui sont prises sans nous. Ce collectif de dix clubs de la Super DI n’a pas accepté qu’un calendrier lui soit imposé. Ce que nous voulons c’est être associés aux décisions qui nous concernent.

Vous avez été vu récemment en compagnie du Président de la Fédération Mauritanienne de Football ,lors de la finale du Beach soccer. Cette apparition a suscité beaucoup de débats sur votre opposition notamment sur les réseaux sociaux. Quel est votre commentaire ?

Tout d’abord, je tiens à remettre les faits dans leur réalité par rapport à ma présence. Comme acteur du football, j’ai été invité par les organisateurs de cette finale et comme d’habitude j’ai accepté parce que j’aime le sport. Il se trouve que le Président de la Fédération Mauritanienne de Football était lui aussi présent et nous nous sommes assis côte à côte et nous avons échangé. Je tiens ici à préciser qu’Ahmed Ould Yahya et moi ne sommes pas des ennemis. Nous avons d’ailleurs beaucoup de liens qui nous lient en dehors du football et nous nous entendons bien. Cependant, nous sommes opposés dans les idées parce que j’ai ma propre vision de la gestion du football et cela rien ne peut le changer. J’espère avoir été clair parce que je continuerai à défendre mes idées pour le bien de notre football.

Comment jugez-vous l’apport des joueurs expatriés au sein des Mourabitounes ? Doit-on mettre en place un quota ?

Très sincèrement, je dirais que l’apport des joueurs expatriés pour les équipes nationales est important. C’est vrai qu’ils constituent une valeur ajoutée pour ceux parmi eux qui évoluent dans des championnats de valeur et qui ont des temps de jeu. Ce n’est malheureusement le cas pour tous ceux qui sont appelés dans nos équipes nationales. Donc je reviendrai pour dire qu’il est important mais il ne doit fait au détriment des joueurs locaux. Ce sont ces derniers qui constituent les valeurs sûres pour notre football et ils doivent avoir plus d’attention. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il faut instaurer des quotas mais les sélectionneurs doivent prêter plus attention aux joueurs locaux en supervisant les matchs de championnats parce que les villégiatures en Europe ne ramènent souvent que des joueurs de seconde zone.

Recueillis par THIAM Mamadou

● Le Grand Entretien du Blog | En exclusivité avec une avocate franco-mauritanienne Assa KONATE

Le Grand Entretien du Blog (Le GEB) vous revient avec l’interview d’une avocate franco-mauritanienne Maître KONATE Assa, officiant au Barreau d’Orléans (Région Centre-Val de Loire). Issue du groupe sociolinguistique sooninké et originaire de Kinininkoumou (Guidimagha en Mauritanie) , elle nous brosse succinctement son parcours et ses analyses qui peuvent constituer une source d’inspiration pour la jeunesse issue de l’immigration. Découvrez ci-après l’intégralité de l’entretien :

Question 1 : Bonjour Madame KONATE Assa, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs, parcours académique et professionnel ?

Je suis Assa KONATE, avocate au Barreau d’Orleans depuis février 2022.
Je suis d’origine mauritanienne, mes parents sont originaires de Kinininkoumou dans la région du GUIDIMAKHA.
Je suis née en France à Orléans dans le Loiret. Après mon BAC ES, j’ai débuté mes études universitaires à l’Université Paris XIII de Villetaneuse ou j’ai obtenu un DUT Carrières Juridiques. J’ai décidé de rentrer à Orléans pour poursuivre mes études de droit.
A ce moment-là, je n’avais pas encore envisagé de devenir avocate. Je souhaitais avant tout obtenir un bagage juridique solide avant d’entrer dans le monde professionnel. J’ai donc obtenu ma licence en droit général, un master 1 puis un master 2 en droit public.

Question 2 : Juriste de formation de base, vous êtes avocate depuis quelques mois, quelles sont les étapes importantes menant à cette fonction en France ? Et également pouvez-vous nous préciser votre champ d’exercice (spécialité) ?

J’ai toujours travaillé durant mes études. J’ai eu l’occasion de pouvoir occuper des postes en lien direct avec mes études de droit au sein de différents tribunaux et administrations publiques. C’est lors de mon expérience en tant que greffière au sein d’un tribunal que j’ai commencé à murir ce projet de devenir avocat.
Pour plusieurs raisons, je me suis rendu compte que je ne connaissais pas bien ce métier.
C’est en assistant aux différentes audiences et plaidoiries, en relisant les conclusions et sollicitations des avocats que j’ai manifesté un réel intérêt pour la profession.
J’ai en quelque sorte découvert que l’avocat pouvait à son niveau faire bouger les choses…
J’ai également été séduite par l’aspect libéral de la profession. Le fait de pouvoir être libre et indépendante correspondait beaucoup à mon état d’esprit et à mes aspirations.
La profession d’avocat est une profession réglementée accessible aux titulaires du certificat d’aptitude à la profession d’avocat (CAPA).
Ces certificats sont délivrés par les Centres Régionaux de Formation Professionnelle des Avocats.
Pour y entrer, il est nécessaire de réussir un examen organisé par les IEJ (instituts d’études judiciaires).
J’ai passé et obtenu le certificat d’examen d’accès au centre régional de formation professionnelle d’avocats (CRFPA) au sein de l’IEJ d’Orléans.
Dans la foulée, je me suis inscrite à l’EFB (École de formation professionnelle des barreaux du ressort de la cour d’appel de Paris) pour suivre la formation initiale.
Il s’agit d’une formation initiale obligatoire qui se déroule sur une période de 18 mois.
Elle est sanctionnée par le CAPA qui comporte diverses épreuves orales et écrites.
Après l’obtention de mon CAPA, j’ai demandé mon inscription au tableau de l’Ordre du barreau d’Orléans, après avoir prêté le serment nécessaire à l’exercice de la profession.

Je suis avocate généraliste.

Néanmoins, du fait de mon histoire personnelle, je savais que je voulais me diriger vers le droit des étrangers.
Le droit des étrangers est l’ensemble des règles qui ont pour objet d’encadrer les questions liées à l’entrée, au séjour et à l’établissement des étrangers sur le territoire français.
Les étrangers rencontrent bien souvent des difficultés dans le cadre de leurs démarches administratives leur permettant de se maintenir sur le territoire français.
En effet, les processus administratifs sont souvent complexes et nécessitent la connaissance des normes et règlements en vigueur.
De plus, la communication peut s’avérer difficile pour les étrangers, dans la mesure ou la langue française n’est pas toujours maîtrisée.
Un avocat peut non seulement aider à comprendre le système administratif, mais aussi aider à résoudre des problèmes juridiques, à faire valoir des droits et à contester des décisions administratives.
Ce domaine représente une grande partie de mon domaine d’activité.
Je pratique également le droit de la famille, le droit administratif et le droit civil.

Question 3 : française et afro-musulmane, quelle analyse faites-vous sur le débat politico-médiatique récurrent autour de la question de l’islam en France ?

En tant que femme, noire et musulmane, on peut dire que je cumule toutes les tares de cette société !
La profession d’avocat reste encore très fermée même si elle demeure plus ouverte en région parisienne.
En passant l’examen du barreau et en m’installant à Orléans, je savais que je me lançais dans un milieu qui peut paraitre assez fermé et assez homogène socialement parlant… cela ne m’a jamais freiné au contraire ! J’aime être là où l’on ne m’attend pas !
Je pense que pour faire avancer les choses, il faut que de plus en plus de jeunes issus de mon milieu ose !
On peut être femme, noire, française, musulmane et avocate !

Question 4 : De votre position occupant une fonction libérale intellectuellement fournie, qu’entendez-vous sous la notion du féminisme aujourd’hui ?

Il n’y a pas un féminisme mais plusieurs féminismes, chacun peut être féministe à sa manière.
Comme il y a plusieurs façons d’exercer la profession, il y a plusieurs façons de vouloir défendre les droits des femmes.

Pour ma part, c’est de considérer que la femme est l’égal de l’homme et que cela doit se manifester dans tous les domaines de la société sans oublier les spécificités qui nous caractérisent.
En tant que femme dite « racisée » nous avons nos propres revendications car nous subissons différentes formes d’oppression et de discriminations en plus du sexisme.
L’afro-féminisme répond à cette double discrimination, que l’on appelle l’intersectionnalité : celle du sexisme et du racisme.
Je souhaite que les femmes noires sachent qu’elles peuvent, elles aussi, accéder à des postes à responsabilité au même titre qu’un homme ou une femme blanche.

Question 5 : vous êtes issue du groupe sociolinguistique soninké, êtes-vous au courant des tensions sociales qui y couvent autour des problématiques liées à l’esclavage par ascendance ? Si oui , quel message avez-vous à l’endroit de la communauté et particulièrement aux associations engagée pour plus d’égalité sociale ?

Je ne me suis pas lancé dans la profession par hasard…
Depuis ma tendre enfance, j’ai toujours eu une aversion pour l’injustice… j’ai toujours eu ce penchant systématique pour les opprimés…et donc manifestement l’esclavage par ascendance est une forme d’injustice qu’on ne peut pas nier…
Je pense que cela s’explique en grande partie par l’ignorance et la non connaissance de ce qui relève des droits humains… je pense que si chacun connaissait ses droits en tant qu’être humain ce fléau n’existerait pas … j’encourage donc les membres de la communauté à s’engager et à sensibiliser… pour honorer les droits humain….

Maître Assa KONATE
Avocat au Barreau d’Orléans

● Réalisé par KS pour le BLOG

● Mauritanie: plaidoyer pour l’officialisation des langues nationales [Vidéo] | La position du député Biram Dah Abeid.

Biram Dah Abeid, député et plusieurs fois candidat à la présidentielle, et deux experts livrent un brillant plaidoyer en faveur de l’officialisation et l’enseignement des langues nationales. En Mauritanie, les langues nationales sont le peul, le soninké et le wolof. L’arabe est la langue officielle du pays.

Le débat sur la nécessité d’introduire les langues nationales dans le système éducatif se poursuit. En juillet 2022, l’Assemblée nationale de Mauritanie a adopté une nouvelle loi introduisant les langues nationales dans l’enseignement primaire, en imposant l’enseignement de l’arabe aux non Arabes et au moins une langue nationale aux locuteurs arabes.

Biram Dah Abeid, député, opposant, plusieurs fois candidat malheureux à la présidentielle, insiste sur l’importance vitale de la langue et de la culture qui déterminent la personnalité d’un peuple. Il rappelle que l’officialisation et l’enseignement des langues nationales représentent une vieille revendication, toujours actuelle, qui figure dans son programme.

Abdallah Mohamed, linguiste, lie le retard de l’Afrique au non usage des langues nationales dans l’enseignement, et fait les éloges du multilinguisme.

Yero Sylla, expert ayant servi à l’Institut des Langues Nationales pendant une vingtaine d’années, souligne l’importance de la formation de base dans la langue de naissance, toujours déterminante dans la qualité de la suite du cursus scolaire et universitaire.

• Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)

©️ Crédit source : https://afrique.le360.ma/culture/mauritanie-plaidoyer-pour-lofficialisation-des-langues-nationales_FPUTZVTYHBBQXA7QEWQIPSOYHU/