● La justice est-elle indépendante dans les pays d’Afrique francophone subsaharienne ? | Le cas de la Mauritanie

En théorie l’indépendance du pouvoir judiciaire est aujourd’hui considérée comme un des principes cardinaux de l’époque contemporaine, qui concourt à la fois à la garantie des libertés fondamentales, à la promotion de la démocratie et à la consolidation de l’Etat de droit en Afrique francophone subsaharienne. Ce principe est inscrit dans les constitutions de la plupart des Etats francophones d’Afrique de l’Ouest tels que le Sénégal, la Mauritanie, le Mali, le Bénin et le Niger. La consécration de ce principe dans les lois fondamentales et l’institutionnalisation du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) sont censées donner une certaine garantie au profit du pouvoir judiciaire pour soustraire les magistrats et la justice de l’arbitraire et de l’emprise du pouvoir exécutif. Mais hélas… !

La notion d’indépendance est proche de l’impartialité ou de la neutralité. L’indépendance est définie par la doctrine comme un statut qui permet au juge de résister aux pressions provenant des autorités extérieures quelconques et/ou politiques. En d’autres termes, elle se traduit par l’absence de pression ou de pouvoir d’une instance extérieure qui aurait droit de regard ou d’intervention sur la fonction du juge. Je pense notamment le pouvoir politique, entre autres.
Cependant, la crise de la justice au 18ème siècle (le siècle des lumières) en occident a fait naître un vaste mouvement d’idées des philosophes et des hommes de droit qui dénoncent une justice inhumaine et proposent des réformes. La pensée politique et philosophique de ces partisans des « lumières », de Voltaire en passant par Rousseau, Beccaria et Montesquieu était calquée sur la cruauté de l’ancien système judiciaire et la réforme de celui-ci. Le théoricien et magistrat qu’était Montesquieu, par ses idées politiques et judiciaires a proposé dans son célèbre ouvrage « L’Esprit des lois », les trois pouvoirs : celui de faire des lois (législatif), celui d’exécute les résolutions publiques (exécutif) et celui de juger (judiciaire). Pour l’auteur selon Jean-Pierre ROYER, ce « mécanisme tempéré permet d’atteindre un équilibre favorable au maintien de la liberté c’est-à-dire en respectant tout à la fois l’indépendance de l’Etat dans le principe de son action et le respect de la singularité des personnes et de leurs biens ».
Après les indépendances en 1960 les Etats africains, notamment les Etats francophones subsahariens (le Sénégal, le Mali, La Mauritanie et le Mali) ont choisi la constitution française de 1958 comme une norme référentielle. Le système judiciaire de ces pays d’Afrique francophone est calqué sur celui du pays colonisateur (la France). La première constitution de la Mauritanie indépendante du 20 mai 1961 après celle de 1959 est inspirée largement des institutions françaises et affirmait son attachement de la République islamique de Mauritanie aux principes de droits fondamentaux de droits de l’homme définis par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et celle de 10 décembre 1948. Mais sauf que celle-ci ne fait aucune mention sur le « principe de la séparation des pouvoirs » tel qu’il a été théorisé par Montesquieu et prévu par la 5ème République française. Il a fallu attendre la constitution du 20 juillet 1991 pour voir apparaître la mention de la « séparation des pouvoirs ». Aux termes de l’article 89 de la constitution du 20 juillet 1991 « le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Le Président de la République est garant de l’indépendance magistère. Il est assisté par le conseil supérieur de la magistrature qu’il préside… ». Cette disposition constitutionnelle évoque l’indépendance de la justice comme un postulat mais la réalité vient parfois affreusement démentir au quotidien. En Mauritanie, tout comme le Sénégal, le Mali et le Niger pour ne citer que cela, la justice connaît manifestement le plus d’atteintes en dépit de la protection constitutionnelle par l’emprise du garde des sceaux, le ministre de la justice d’une part et l’influence du président de la République sur le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) en sa qualité de président de cet organe disciplinaire et de gestion de la carrière des magistrats d’autre part.
Le système judiciaire des pays d’Afrique francophone subsaharienne hérité de la France, le ministère de la justice est l’organe auquel est assigné la fonction administrative et d’organisation de la justice. Celui-ci exerce une influence prégnante dans les institutions judiciaires. Cette influence s’induit non seulement dans la gestion administrative mais aussi dans la gestion financière. Au-delà de cette gestion administrative et financière il existe un phénomène très grave qui porte atteinte à l’indépendance des magistrats : c’est le rattachement du parquet à l’exécutif particulièrement au ministère de la justice. Le pouvoir judiciaire, gardien de nos libertés individuelles qui doit rester indépendante, comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet. Le parquet est sous l’autorité du ministère de la justice et reçoit des ordres de celui-ci et applique la politique d’action publique du gouvernement. Par exemple au Bénin, le ministre de la justice peut dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétence de telles réquisitions écrites qu’il juge opportunes, selon l’article 34 du code béninois de procédure pénale. En Mauritanie, l’ancien ministre de la justice et professeur de droit Haimoud RAMDAN, a souligné dans ces travaux de recherche que « l’influence de l’action des services du ministère de la justice sur le cours de la justice se manifeste par la charge des moyens dont il assure la répartition et la pression du milieu professionnel du magistrat qui souvent est proche des thèses et idées du pouvoir exécutif ». Cette réalité continue de plonger le parquet dans une situation de dépendance vis-à-vis du pouvoir politique et qui constitue à mon sens une entorse fatale à l’indépendance de la justice.
Une autre atteinte que l’exécutif porte manifestement à la justice est celle de la composition du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM). Cet organe est censé être un bouclier du pouvoir judiciaire aujourd’hui, il se retrouve entre les mains du pouvoir politique pour affaiblir la justice davantage. L’institutionnalisation du CSM comme pièce maîtresse de la justice répond à une exigence de garantie d’indépendance de la justice face aux atteintes des autres pouvoirs de l’Etat. Le CSM est une création originale du droit français par la loi du 31 août 1883 relative à l’organisation judiciaire afin d’assurer un cadre juridique protecteur aux juges. Sa mission principale est d’assister le président de la République en tant qu’autorité de nomination et garant de l’indépendance de la justice. Ainsi, en 2008, la France a engagé une entreprise de modernisation des institutions de l’État. Plusieurs piliers constitutionnels de la Ve République, dont la justice ont alors connu de profondes évolutions. S’agissant de la justice, il était question de consolider l’indépendance de l’autorité judiciaire face à l’exécutif.
En Mauritanie l’article 17 de la loi du 17 février 1994 prévoit que « le CSM assiste le président de la République garant de l’indépendance de la magistrature ». Le CSM mauritanien est composé de 11 membres et présidé par le président de la République. Le ministre de la justice est le vice-président. Il faut souligner que le président de la République et son ministre de la justice sont des membres de droit du CSM. La composition du CSM en Mauritanie est approximativement la même qu’au Sénégal. Cette composition est de plus en plus ardemment critiquée au Sénégal par les magistrats et la doctrine qui pensent qu’elle menace l’indépendance de la justice et qu’elle fait du CSM un organe non représentatif de la magistrature. Le président de la République dispose une compétence liée en matière de nomination des magistrats. Comme le souligne l’article 4 de la loi organique n° 92-27 du 30 mai 1992 modifiée, portant statut des magistrats au Sénégal, qui dispose que « les magistrats sont nommés par décret du Président de la République, sur proposition du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice ». Pour Omar DIOP, « le Conseil supérieur de la magistrature est une instance controversée […] les modalités de désignation des membres du CSM reflètent curieusement un certain déséquilibre au profit de l’exécutif en matière d’organisation de la justice. Le Président de la République et le garde des Sceaux concourent à la nomination des membres du Conseil et partagent la présidence de celui-ci ».
Ce faisant, le principe de séparation de pouvoirs a pour but d’éviter toute influence du pouvoir politique dans le cours de la justice. Le souhait de la doctrine est de supprimer toutes les manifestations de la soumission organique et fonctionnelle de la justice au pouvoir politique. Avec l’évolution de nos sociétés vers l’exigence de respect des principes démocratiques et les demandes exorbitantes de justice, les réformes constitutionnelles et judiciaires s’imposent en Mauritanie. Après avoir diagnostiqué le « cancer » de notre justice, il est temps de mettre fin la prééminence du pouvoir politique sur le judiciaire et de supprimer la présidence du CSM par le président de la République et la vice- présidence par le ministre de justice. Nous proposons de confier la présidence du CSM à la formation du siège (au premier président de la Cour suprême) et la vice-présidence à la formation du parquet (au procureur général près la Cour suprême).
Par avance, je souhaite une très belle fin de fête d’année à tous les membres (les chercheurs, doctorants, professeurs, étudiants…) de mon Centre d’Histoire et d’Anthropologie du Droit (CHAD) de l’Université Paris-Nanterre….
Qu’Allah bénisse la Mauritanie et les mauritaniens !!!
Que 2024 soit une année de paix, de santé de fer et de bonheur pour toute l’humanité !

Boubou BA
Docteur en droit
Membre associé au centre d’histoire et d’anthropologie du droit (CHAD)
Université Paris-Nanterre
Juriste au Palais de justice de Pontoise-France

● Qui est Ousmane SAO ? Nous n’avons plus à le présenter ! [Rmi-info]

Qui est Ousmane SAO ?

Nous n’avons plus a le présenter !

Un résumé de c’est réalisations et engagements :

Identité et origines :

Il s’appelle Sao Ousmane et de nationalité mauritanienne.

Originaire de la vallée du Fleuve dans la région de Gorgol (Kaédi).

Engagement associatif :

Il est un membre actif de l’association Fedde Hirnangue Bossoya, qui regroupe plusieurs villages autour de Kaédi.

Il est le coordinateur général de l’association des jeunes du village de Jooke en Europe.

Un sympathisant actif de plusieurs autres associations humanitaires nationales et internationales
en France.

Il préside l’association Cadre de Concertation et de Dialogue des Mauritaniens de la Diaspora
(CCDMD), une association basée en Europe qui vise à renforcer les liens entre tous les Mauritaniens
de la Diaspora, avec des membres disséminés sur tous les continents.

Parcours académique :

Ousmane SAO a fait ces années de primaires, secondaires et universitaires à Nouakchott.

Réside en France pour des études doctorales.

Il est depuis quelques années basé en France, titulaire de deux doctorats :

Le premier en Géologie du quaternaire, avec un double focus sur la reconstitution des paléoenvironnements et la protection du patrimoine culturel mauritanien.

Le second en sociologie politique et relations internationales, intitulé Organisation des Unités sociopolitiques, culturelles et juridiques de la population mauritanienne et relations internationales.

C’est un parcours très riche et diversifié, mêlant engagement associatif, recherche académique et promotion de la culture mauritanienne. Bravo pour tout ce que tu as accompli docteur Ousmane SAO.

Oui, je le dis haut et fort Monsieur Sao Ousmane, avec son profil, son expérience et ses diplômes, pourrait potentiellement représenter la Mauritanie à l’UNESCO en tant que cadre.

Doté d’un impressionnant bagage académique, serait un candidat idéal pour occuper le poste de conseiller culturel à l’UNESCO. Ses multiples diplômes et son expertise
lui confèrent les qualifications nécessaires pour contribuer de manière significative à la promotion et à la préservation de la diversité culturelle au sein de cette organisation internationale.

Ousmane SAO fut en 2019 conseiller chargé de communication auprès du directeur national de campagne du président de la campagne de Mohamed ould cheikh Ghazouani en France et en Mauritanie.

N’oublions pas l’appel du président Mohamed ould cheikh Ghazouani qui a déclaré sa flamme à la diaspora dans son programme.

Sa solide formation académique, ses multiples diplômes et son expertise
font de lui un candidat idéal pour contribuer de manière significative à la promotion et à la préservation de la diversité culturelle au sein de cette organisation internationale.

Abdoulaziz DEME

Paris le 14 décembre 2023

● Lien média https://rmi-info.com/qui-est-ousmane-sao-nous-navons-plus-a-le-presenter/?fbclid=IwAR1RpJPjulSP0atibPY_Y5KLHh0U46vMVN0IptqfiTWE8y3He87Ij3nu36w

● Note de lecture : l’instruction détruit les chaînes de toute servitude, par M. Frédéric Douglass (États-Unis).

Cet ouvrage est une restitution d’un vaillant cheminement vers la liberté de cette voix historique de l’abolitionnisme aux États-Unis d’Amérique courant 19ème siècle. M. Frédéric Douglass était un mulâtre (né d’une femme esclavisée et son maître) qui vécut les fers de l’esclavage et s’était décidé à s’en débarrasser. Natif de Tuckahoe, près de Hillsborough (comté de Talbot, Maryland) en une date imprécise selon ses dires. Il meurt en 1895.

Il devint une redoutable plume contre un système inhumain et criminel qui broyait impitoyablement du « nègre ». Ici on saura l’ampleur de la catastrophe que vécurent les personnes (et leurs descendants) esclavisées lors de l’abominable traite transatlantique. En roue libre, les planteurs esclavagistes du sud étasunien tenaient un système sans limites pour casser et détruire toute expression d’humanité chez « ces damnés » sans secours. Fouetter, insulter, exploiter, emprisonner, violer, vendre… aux enchères aussi, louer, hériter, séparer (enfants, frères, sœurs et parents vendus ou hérités séparément), tromper, humilier, abrutir, tuer…, c’est ainsi que Frédéric Douglass égrènait les malheurs qui accablèrent ces hommes arrachés de leurs terres lointaines (l’Afrique).

Ici quelques passages illustratifs :

« Il la fouettait pour la faire crier et la fouettait pour la faire taire. « 

« On nous mit tous en rang pour nous évaluer. Hommes et femmes, vieux et jeunes, mariés et célibataires furent alignés avec les chevaux, les moutons et les porcs » , lors de l’évaluation de l’héritage d’un maître qui décéda.

Dans sa prolifique narration de cette douloureuse réalité de la servitude, quelques termes-notions ont particulièrement retenu mon attention :

• La plantation principale, surnommée la Ferme de la Grande Maison par les personnes esclavisées, est cet emplacement type QG dont dépendent plusieurs fermes avoisinantes de moindre taille. Il est d’un ultime privilège pour les esclaves « élus » qui y sont affectés comme lieu de labeur. J’ose un rapprochement avec ce qu’on disait en sooninké « Ka xooren Te » voulant dire « le champ de la grande maison ou famille ». Certains esclavagistes sooninkè avaient une possession terrienne principale qui est prioritairement exploitée et travaillée par leurs esclaves.

• Le commandeur d’esclaves, un employé généralement blanc qui s’occupe comme contremaître d’une plantation et les esclaves qui y triment. Dépeint selon le rapport de M. Douglass, comme un horrible traitant au service des propriétaires d’esclaves dans leurs plantations. Il est chargé de faire régner l’ordre, et avec fureur sur certains esclaves qui seraient peu dociles à la corvée intraitable. On pourrait le rapprocher à ce qu’on appelle en soninké « komo baganda » donnant comme substance « un rameuteur des esclaves » dans les champs du maître. Ici d’après mes échanges avec un doyen, ce rôle était souvent tenu par un élément-servile de confiance du maître et craint par ses semblables de condition. Il pouvait infliger de dures corrections corporelles aux esclaves récalcitrants aux ordres délégués par le maître ou par certains membres de sa famille.

• Le mot lynchage et son origine, la loi de Lynch prévoyait la mort pour un nègre qui frappa un Blanc.
En bas de page 142, elle est détaillé comme suit : « exécution sommaire de quelqu’un par une foule sans procès. Par référence au capitaine William Lynch (1742-1820) qui établit cette pratique en Virginie. Le mot ‘lynchage’ apparut en français en 1883. »
Et ici lynchés à mort, c’était le cas à Djandjoumé (village soninké dans la région de Kayes – Mali) dans la nuit du 1 septembre 2020 pour 4 pères de famille militants anti-esclavagistes (Mountagha Diarriso, Hamet Sissoko, Youssou Sissoko et Gossi Sissoko de 42 à 72 ans), Lire https://www.matininfos.net/des-experts-des-droits-de-lhomme-de-lonu-exhortent-le-mali-a-mettre-fin-a-lesclavage-une-fois-pour-toutes/78759/ .

M. Frédéric Douglass était un Cicéron de l’abolitionnisme en son temps, et son travail intellectuel d’antan est une source (ressource) d’inspiration d’une grande valeur pour toute entreprise de mobilisation humaniste.

Les Noirs américains et d’autres communautés des Antilles « élargies » issus de cette terrible et criminelle réalité de la traite, peuvent réclamer un droit d’explication aux descendants afro restés sur le continent africain. Un sérieux travail se doit d’être mené sans complaisance ni transfert de victimisation malencontreux.

KS pour le BLOG