✓ La conférence d’IRA-France à Paris | comme vous y étiez en [photos et vidéo]

Paris, 6 janvier 2024, l’aile en France de l’Ong droit-de-l’hommiste IRA-MAURITANIE (Initiative pour la Résurgence Abolitionniste) a organisé une conférence sur la thématique « la persistance de l’esclavage intra-africain en Afrique de l’ouest ». Ont pris part à cet événement comme conférenciers, l’honorable député M. Biram DAH ABEID, M. Samba FOFANA (vice-président de l’association Armepes-France de Ganbanaaxu Fedde), M. BA Bocar Oumar (Cadre en Europe du parti Ajd/Mr) et M. Ibrahima WELE (Flam). M. Moulaye HASSENE (militant politique) a été aux manettes pour modérer les échanges.

À noter la projection en introduction d’un film de M. Sébastien KRAFT titré « Destins croisés : les esclaves oubliés de Mauritanie » voir https://youtu.be/lXfQs9RYshU?si=obbjraIchokV3qC9

Les différentes interventions ont été à la hauteur des enjeux autour de la problématique abordée ainsi que les contributions et témoignages du public.

Un vœu est largement exprimé par tous : il faut impérativement décloisonner les luttes et les engagements pour faire émerger une force militante cohérente et efficiente.

KS [11•19] pour le BLOG

● Communiqué de presse : Notre soutien fraternel au magistrat Haroun Oumar Ideighbi


Ces derniers jours, plusieurs échos médiatiques à travers divers communiqués d’Ong font cas d’une sortie haineuse de certains milieux extrémistes aux mentalités féodales et esclavagistes. L’instigateur de ces attaques suprémacistes contre le Directeur de la législation au ministère de la justice, serait un dénommé Yehdhih ould Dahi. Encore une fois dans notre pays, des restes et préjugés discriminatoires et esclavagistes ressurgissent d’une manière décomplexée et publique. Propos scandaleux qui sont symptomatiques des visées honteusement réactionnaires qui traversent certains pans dans nos communautés. Nous sommes très loin du discours présidentiel de Ouadane dans lequel ces stigmates rétrogrades avaient été indexés par le président Mohamed Cheikh El-Ghazouani.

À la lumière des éléments à notre connaissance sur cette affaire, nous, Armepes-France, l’association Ganbanaaxu Fedde Mauritanie et partenaires, tenons ;

– à exprimer notre entière solidarité à l’endroit de notre compatriote Haroun Oumar Ideighbi,

– à dénoncer vigoureusement les propos inqualifiables tenus à son encontre et par extension à l’encontre de toutes les couches sociales assignées dans un mépris culturel de plus abject,

– à appeler les hautes autorités étatiques mauritaniennes pour sévir réellement contre ces discours insultants et agressifs affectant la mémoire d’une grande frange de notre peuple.

Le 26 décembre 2023

Armepes-France, Ganbanaaxu Fedde Mauritanie et partenaires.

● Note de lecture : l’instruction détruit les chaînes de toute servitude, par M. Frédéric Douglass (États-Unis).

Cet ouvrage est une restitution d’un vaillant cheminement vers la liberté de cette voix historique de l’abolitionnisme aux États-Unis d’Amérique courant 19ème siècle. M. Frédéric Douglass était un mulâtre (né d’une femme esclavisée et son maître) qui vécut les fers de l’esclavage et s’était décidé à s’en débarrasser. Natif de Tuckahoe, près de Hillsborough (comté de Talbot, Maryland) en une date imprécise selon ses dires. Il meurt en 1895.

Il devint une redoutable plume contre un système inhumain et criminel qui broyait impitoyablement du « nègre ». Ici on saura l’ampleur de la catastrophe que vécurent les personnes (et leurs descendants) esclavisées lors de l’abominable traite transatlantique. En roue libre, les planteurs esclavagistes du sud étasunien tenaient un système sans limites pour casser et détruire toute expression d’humanité chez « ces damnés » sans secours. Fouetter, insulter, exploiter, emprisonner, violer, vendre… aux enchères aussi, louer, hériter, séparer (enfants, frères, sœurs et parents vendus ou hérités séparément), tromper, humilier, abrutir, tuer…, c’est ainsi que Frédéric Douglass égrènait les malheurs qui accablèrent ces hommes arrachés de leurs terres lointaines (l’Afrique).

Ici quelques passages illustratifs :

« Il la fouettait pour la faire crier et la fouettait pour la faire taire. « 

« On nous mit tous en rang pour nous évaluer. Hommes et femmes, vieux et jeunes, mariés et célibataires furent alignés avec les chevaux, les moutons et les porcs » , lors de l’évaluation de l’héritage d’un maître qui décéda.

Dans sa prolifique narration de cette douloureuse réalité de la servitude, quelques termes-notions ont particulièrement retenu mon attention :

• La plantation principale, surnommée la Ferme de la Grande Maison par les personnes esclavisées, est cet emplacement type QG dont dépendent plusieurs fermes avoisinantes de moindre taille. Il est d’un ultime privilège pour les esclaves « élus » qui y sont affectés comme lieu de labeur. J’ose un rapprochement avec ce qu’on disait en sooninké « Ka xooren Te » voulant dire « le champ de la grande maison ou famille ». Certains esclavagistes sooninkè avaient une possession terrienne principale qui est prioritairement exploitée et travaillée par leurs esclaves.

• Le commandeur d’esclaves, un employé généralement blanc qui s’occupe comme contremaître d’une plantation et les esclaves qui y triment. Dépeint selon le rapport de M. Douglass, comme un horrible traitant au service des propriétaires d’esclaves dans leurs plantations. Il est chargé de faire régner l’ordre, et avec fureur sur certains esclaves qui seraient peu dociles à la corvée intraitable. On pourrait le rapprocher à ce qu’on appelle en soninké « komo baganda » donnant comme substance « un rameuteur des esclaves » dans les champs du maître. Ici d’après mes échanges avec un doyen, ce rôle était souvent tenu par un élément-servile de confiance du maître et craint par ses semblables de condition. Il pouvait infliger de dures corrections corporelles aux esclaves récalcitrants aux ordres délégués par le maître ou par certains membres de sa famille.

• Le mot lynchage et son origine, la loi de Lynch prévoyait la mort pour un nègre qui frappa un Blanc.
En bas de page 142, elle est détaillé comme suit : « exécution sommaire de quelqu’un par une foule sans procès. Par référence au capitaine William Lynch (1742-1820) qui établit cette pratique en Virginie. Le mot ‘lynchage’ apparut en français en 1883. »
Et ici lynchés à mort, c’était le cas à Djandjoumé (village soninké dans la région de Kayes – Mali) dans la nuit du 1 septembre 2020 pour 4 pères de famille militants anti-esclavagistes (Mountagha Diarriso, Hamet Sissoko, Youssou Sissoko et Gossi Sissoko de 42 à 72 ans), Lire https://www.matininfos.net/des-experts-des-droits-de-lhomme-de-lonu-exhortent-le-mali-a-mettre-fin-a-lesclavage-une-fois-pour-toutes/78759/ .

M. Frédéric Douglass était un Cicéron de l’abolitionnisme en son temps, et son travail intellectuel d’antan est une source (ressource) d’inspiration d’une grande valeur pour toute entreprise de mobilisation humaniste.

Les Noirs américains et d’autres communautés des Antilles « élargies » issus de cette terrible et criminelle réalité de la traite, peuvent réclamer un droit d’explication aux descendants afro restés sur le continent africain. Un sérieux travail se doit d’être mené sans complaisance ni transfert de victimisation malencontreux.

KS pour le BLOG

● Victime du Qatargate s’exprime sur les allégations selon lesquelles il a été empêché d’obtenir le plus grand prix des droits de l’homme [POLITICO]



Un militant anti-esclavagiste se dit « choqué » par les révélations de POLITICO sur l’influence présumée de la corruption sur le prix Sakharov de l’UE.



BRUXELLES – Un militant anti-esclavagiste s’est exprimé après que des politiciens soupçonnés de corruption aient prétendument conspiré pour l’empêcher d’être nommé pour le prix des droits de l’homme le plus prestigieux de l’Union européenne.

Biram Dah Abeid, qui fait campagne contre les violations des droits de l’homme en Mauritanie, était considéré comme un candidat potentiel au prix Sakharov en 2020. Parmi les anciens lauréats figurent le peuple ukrainien et Nelson Mandela.

Mais POLITICO a vu un document qui affirme qu’Abeid a été empêché de progresser dans le processus de nomination dans le cadre d’une campagne d’influence présumée menée par l’ancien eurodéputé Pier Antonio Panzeri et son ex-aide Francesco Giorgi.

Giorgi et Panzeri ont tous deux fait l’objet de poursuites préliminaires dans l’affaire dite du « Qatargate », le plus grand scandale de corruption qui ait touché les institutions européennes depuis des décennies.

Des fichiers divulgués de l’enquête de police, vus par POLITICO, suggèrent qu’Abeid a été exclu de la liste des candidats que le groupe des eurodéputés socialistes et démocrates allait proposer pour le prix, après que Panzeri et Giorgi soient intervenus.

Dans un onglet du tableur intitulé « Mauritanie », une entrée datée du 9 septembre 2020 mentionne un « Birame » – une orthographe alternative du nom d’Abeid – en référence au prix Sakharov. C’est à cette même date que le groupe S&D a annoncé sa liste finale de candidats, qui ne l’incluait pas.

« Birame est écarté des trois finalistes du groupe S&D », peut-on lire dans le document.

Des personnes ayant connaissance du processus en 2020 ont confirmé que M. Giorgi lui-même et des eurodéputés, y compris du groupe S&D, ont fait pression pour que M. Abeid reçoive le prix Sakharov cette année-là.

Choqué
Abeid, fondateur de l’Initiative anti-esclavagiste pour la résurgence du mouvement abolitionniste, a souvent été pris pour cible par le gouvernement du pays d’Afrique de l’Ouest, et a même été emprisonné en 2015 et 2018. Il a déclaré à POLITICO qu’il avait été « choqué et abattu » en apprenant les affirmations contenues dans les fichiers divulgués selon lesquelles il avait été empêché de concourir pour le prix.


« L’image du prix Sakharov a été très durement touchée », a déclaré M. Abeid à POLITICO. « Maintenant, nous savons tous que le prix Sakharov peut faire l’objet de négociations entre des acteurs puissants qui peuvent influencer la manière dont il est décerné.

Abeid s’est souvenu avoir rencontré Panzeri à plusieurs reprises entre 2013 et 2019.

« Il était extrêmement gentil, extrêmement sensible. Il m’a fait croire qu’il essayait de transmettre tout l’esprit humanitaire de l’Union européenne », a déclaré M. Abeid. « L’argent peut influencer ce prix. Et surtout l’argent corrompu. »

En 2020, M. Giorgi était l’assistant de l’eurodéputé Andrea Cozzolino, qui a également été inculpé dans l’affaire du Qatargate et qui nie toute implication.

Abeid avait déjà été présélectionné par le groupe socialiste en 2018. En 2020, le prix – qui est largement décidé par les trois plus grands groupes politiques du Parlement européen – a finalement été décerné à l’opposition démocratique de la Biélorussie. Des personnes familières avec les discussions en 2020 ont laissé entendre que M. Abeid n’était pas un favori cette année-là.

« Je savais que j’avais une chance de remporter le prix », a déclaré M. Abeid. « J’étais en très bonne position en tant que membre d’un mouvement de résistance et de dissidence. Je suis très étonné, très choqué ».

M. Abeid a déclaré que les autorités mauritaniennes l’avaient empêché de revendiquer ce qu’il pense être sa victoire légitime lors des élections présidentielles du pays – en 2014 et en 2019. Il a établi un parallèle avec Giorgi et Panzeri. « Les amis [de la Mauritanie] au sein de l’Union européenne, comme Panzeri, m’empêchent toujours de gagner », a déclaré M. Abeid. « Même si je représente la majorité des personnes qui souffrent encore de l’esclavage en Mauritanie. Il se présente à nouveau à la présidence en 2024.

M. Panzeri a déclaré à la police que lui et M. Giorgi avaient reçu chacun 100 000 euros de la Mauritanie entre 2019 et 2022. Cette affirmation est contestée par M. Giorgi, qui a déclaré aux enquêteurs qu’il ne recevait que 1 800 euros par mois de l’ambassadeur mauritanien à Bruxelles, officiellement à titre de loyer pour un appartement qu’il sous-louait à d’autres personnes.

Les documents de la police montrent que l’accord de Panzeri et Giorgi avec la Mauritanie a été conclu fin 2018 lors d’une réunion avec le président du pays de l’époque, Mohamed Ould Abdel Aziz. Le président, s’est souvenu Panzeri, a proposé que le duo travaille pour s’assurer que l’UE ne « parle pas mal » de la Mauritanie. Cela, a dit M. Panzeri aux enquêteurs, « pourrait être échangé contre de l’argent ».

Un porte-parole de la S&D a déclaré : « Nous ne commentons pas l’enquête judiciaire en cours, si ce n’est pour dire que nous sommes prêts à coopérer pleinement avec les autorités judiciaires. Notre enquête interne n’a révélé aucun fait ou cas qui aurait dû être porté à l’attention de l’enquête. »

Les avocats de Giorgi et Panzeri et le gouvernement mauritanien n’ont pas répondu aux demandes de commentaires.

● Lien média https://www.politico.eu/article/qatargate-biram-dah-abeid-mauritania-giorgi-panzeri-european-parliament/

● Mauritanie 2023 : Les 10 plaies du 10 décembre [IRA-Mauritanie]

A l’instar des multitudes éprises de liberté, l’Ira célèbre, ce 10 décembre 2023, la journée mondiale des droits de l’homme. L’occasion de partager, avec l’opinion, le passif mauritanien en la matière, justifie une commémoration à la hauteur du défi. La lourdeur et l’ancienneté du contentieux requièrent un constat dénué de complaisance. Si l’on doit se réjouir de l’arsenal juridique et des tribunaux mis en place aux fins de pénaliser les crimes d’esclavage, l’on constate, cependant, qu’aucun criminel n’a été emprisonné ; le blanchiment d’infractions aussi graves et anachroniques reste l’unique option des autorités. D’ailleurs, les commanditaires et auteurs de tueries, de déportations à visée ethnique continuent à jouir de l’immunité, tandis que le nombre des préposées à la torture ne cesse de croître, d’une année à la suivante.

1. Pour ne citer que les exemples récents, l’on se souviendra de Souvi Jibril Soumaré, dit Ould Cheïne, assassiné le 09 février 2023 au commissariat de police de Dar Naim (Nouakchott sud). Les tortionnaires ont d’abord essayé de s’exonérer du forfait létal, avant de se rétracter sous la pression de la rue. L’officier de police judiciaire et les exécutants sous son commandement furent arrêtés et soumis à une instruction de justice ; néanmoins, les résultats tardent. Quelques mois après, survint, le 29 mai 2023, à Sebkha (Nouakchott ouest), à l’intérieur d’un bâtiment de la police et dans des circonstances de facture identique, le décès de Oumar Diop, natif de MBagne (sud). Devant la flagrance de l’abus, la colère s’est emparée d’une partie de la jeunesse urbaine, fragilisant davantage la cohésion de la société. Des centaines d’adolescents, d’ascendance subsaharienne, seront traqués et suppliciés, parfois à domicile, puis détenus durant 72 heures. Là aussi, la version officielle concluait à une mort, par arrêt cardiaque, à l’Hôpital national. Or, le personnel médical certifie avoir accueilli, aux urgences, un corps sans vie. Une sombre autopsie, effectuée au Maroc, viendra corroborer le récit tronqué. D’ailleurs et jusqu’à ce jour, le site Facebook de la direction de la sûreté continue d’afficher la thèse de deux accidents, alors même que le Parquet reconnaissait le caractère violent du premier homicide et ordonnait la mise à l’écrou des persécuteurs. A cause du poids de l’impunité et des réflexes grégaires de la médiocratie, la communication des organes en charge du maintien de la paix suit un cours spécifique, que caractérise l’autonomie envers les autres segments de l’Etat. A l’Etat de droit qui s’affiche, s’oppose l’Etat d’exception qui prévaut ; sous la façade des slogans et du zèle factice à signer et ratifier les conventions internationales, veille et se reproduit le monstre familier de la fraude, du double langage et des faux semblants. Le vernis est si mince. Si Janus devait se choisir un passeport, il s’enrôlerait en Mauritanie.

2. A la suite de la révolte devant la récurrence et la banalisation des brutalités racistes, le gouvernement, pris de court, s’empressa de suspendre, pendant quelques jours, l’accès à l’internet. Il s’agit, ici, d’un manquement délibéré à l’intégrité élémentaire de la personne, derrière lequel se profile, toujours, la volonté de réprimer en silence, loin des regards. Pire, lors
des protestations à Boghé (sud), Mohamed Lemine Alioune N’Daiye, né en 1996, a été abattu, d’un tir ciblé. Suivant une jurisprudence bien établie en République islamique de Mauritanie, le tireur et le donneur d’ordre demeurent à l’abri de la moindre sanction. Leur identité relève du secret.

3. Quasiment l’ensemble des démonstrations non-violentes de l’Ira suscitent, de la part des unités anti-émeute, un déchainement de coups et blessures, d’une intensité disproportionnée. Beaucoup de nos militants gardent les stigmates et les séquelles de la maltraitance ; ils en
témoignent sans répit ni exagération, photos et vidéo à l’appui.

4. Les atteintes à la dignité de l’individu et à la jouissance de ses droits civiques, n’ont épargné les députés, tel l’honorable Biram Dah Abeid, plusieurs fois séquestré, maintenu en détention préventive ou condamné des peines relevant du délit d’opinion.

5. La promulgation des normes sur la cybercriminalité ou des restrictions relatives à la préservation des « symboles » rétrécit l’espace, fort exigu des libertés d’expression et d’association. Aussi l’on retiendra, à titre d’illustration, l’extradition – de Dakar – et l’emprisonnement de Youba Siby, un sympathisant de l’Ira, pourtant de nationalité sénégalaise. Jugé en comparution expresse, il écopera de 4 années de réclusion. Le tribunal expéditif lui reprochait des propos de réprobation du racisme et des inégalités de naissance. L’audience se déroulait, en catimini, sans avocat même commis d’office, ni présence de la famille. La pseudo-commission nationale des droits de l’Homme (Cndh), tenta de faire avaliser la régularité de la procédure, par le représentant accrédité à Nouakchott du Haut-commissariat des nations-unies.

6. En cette fin d’année 2023, les partis les plus représentatifs des peuples autochtones de Mauritanie réclament la participation à la démocratie dont le statu quo les prive. Il convient de souligner, en particulier, le cas des partis Radical pour une action globale (Rag) et Forces progressistes du changement (Fpc).

7. Les populations dominées et discriminées aux motifs inavoués de la couleur, de la langue, de la culture et de la généalogie, ne parviennent à obtenir les pièces d’état-civil biométrique, point d’accès à l’exercice du vote.

8. Les rescapés et les héritiers des milliers de concitoyens déportés ou exécutés, de 1986 à 1991, ne peuvent plus dénoncer, en réunion publique, la loi d’amnistie qui absout les responsables de telles cruautés. Une multitude d’entre eux, réfugiée aux Sénégal et Mali voisins, continue à survivre dans la précarité et la morsure de l’exil. Les ministères en charge du litige et de son règlement leur refusent le rapatriement organisé. Apatrides, de parents en progéniture, ils écument des contrées hostiles, en quête de gîte et de couvert. Quiconque s’insurge ou proclame sa solidarité avec eux se retrouve suspecté de racisme. En Mauritanie, le raciste n’est jamais le tueur.

9. Malgré la disponibilité rhétorique du pouvoir à protéger, les femmes et les filles, contre les excès séculaires du patriarcat, l’habitude de la duplicité face aux partenaires extérieurs, rappelle cette manie de la dictature des militaires, qui consiste à servir un discours et son contraire, selon la capacité financière de l’interlocuteur. Mieux encore, le projet de texte, passé sous la censure du Haut-conseil de la fatwa et des recours gracieux, s’est perdu dans les méandres de la bureaucratie. La fameuse instance de contrôle de conformité religieuse se place au-dessus du Conseil constitutionnel et des titulaires de la souveraineté populaire. Ironie du sort, ses membres ne sont pas élus. Enfin, depuis des semaines, le Parlement, quoique sous influence des cercles obscurantistes, attend la première lecture du document.

10. Comble de l’horreur, l’article 306 du code pénal, dans sa mouture de 2018, étend la liquidation physique à des infractions morales, comme le refus de prier, le blasphème, et l’apostasie. Quand il supprime la faculté du repentir, il fait, de la Mauritanie, le seul pays d’Afrique dont le dispositif légal consacre l’imitation de Daesh ; bien plus que l’Arabie saoudite, l’Afghanistan, l’Iran, Brunei et les Maldives, réunis, nous nous sommes piégés, en toute préméditation. Certes, l’Etat n’applique pas les prescriptions ainsi revendiquées mais, en les maintenant dans le corpus des lois, il accorde, aux apprentis illuminés de demain, un formidable outil de sauvagerie et de sexisme. « Gouverner, c’est prévoir et ne rien prévoir c’est courir à sa perte », avertissait, dès 1852, le journaliste français Emile Girardin….

Nouakchott, le 10 décembre 2023

● Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage: le Secrétaire général appelle à réparer les erreurs de l’histoire et à bâtir un monde débarrassé de cette « abomination »

On trouvera ci-après le message du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, à l’occasion de la Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage, célébrée le 2 décembre:

L’esclavage est à la fois une horreur historique et un scandale contemporain.

À l’occasion de la Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage, nous nous souvenons des victimes du passé, en particulier des millions d’Africaines et d’Africains qui ont été arrachés à leur terre, exploités, brutalisés ou tués pendant la traite transatlantique des esclaves. Nos pensées vont également aux 50 millions de personnes qui sont aujourd’hui prises au piège de l’esclavage moderne.

Les appels lancés pour s’attaquer aux effets persistants de l’esclavage et du colonialisme s’amplifient. Le monde doit y répondre. Quand il y a lieu, les pays doivent reconnaître la vérité, éduquer, présenter des excuses, verser des réparations. Les entreprises et autres acteurs devraient faire de même, en interrogeant leurs propres liens avec l’esclavage et en envisageant des réparations.

Il nous faut également agir beaucoup plus rapidement pour mettre fin à ce terrible crime aujourd’hui. Les pays doivent légiférer, protéger les droits des victimes, éliminer les pratiques et les conditions qui permettent à l’esclavage moderne de prospérer, qu’il s’agisse de la traite, de la servitude pour dettes ou de la marginalisation économique. Les entreprises doivent là aussi jouer leur rôle, en veillant à ce que leurs pratiques commerciales respectent les droits humains de toutes et tous.

Ensemble, réparons les erreurs de l’histoire et bâtissons un monde débarrassé de cette abomination qu’est l’esclavage.

●Lien média https://press.un.org/fr/2023/sgsm22059.doc.htm

● Jemal Ould Yessa « Boubacar Messaoud, La réhabilitation tardive d’un symbole »

Crédit photo Radio Mauritanie

Le 28 novembre 2023, la cérémonie de remise des décorations par le Président de la République vient clore un long cycle de mépris et de violence à l’endroit des militants de la lutte contre l’impunité et les discriminations en Mauritanie.

Boubacar Ould Messaoud, longtemps persécuté, condamné en 1998 à 16 mois de prison, affamé, marginalisé et désigné à la vindicte publique durant les années de dictature de Ould Taya, est enfin reconnu, distingué, honoré et ce n’est pas trop tôt. Même vieux et malade, Boubacar sort aujourd’hui de l’épreuve, la tête haute, en digne précurseur de l’autre Mauritanie, celle de demain, définitivement émancipée des inégalités de naissance. SOS Esclaves, son associations pionnière mène désormais ses activités, en collaboration avec le Commissariat aux droits de l’Homme, une évolution que nul n’aurait pressentie, quelques années avant.

Hier accusé de servir l’agenda d’un imaginaire complot des juifs et des chrétiens, le voici savourant, non sans dignité, sa douce et tranquille revanche sur les cuistres et les tartuffes de l’ère Prds. D’autres compatriotes, injustement marginalisés, méritent un traitement similaire, en hommage à leur courage, quand il fallait applaudir et ramper pour manger et grapiller les menues faveurs du tyran.

Tout le mérite revient au Chef de l’Etat, Mohamed Ould Cheikh Ghazouani. Aucun de ses prédécesseurs ne s’était risqué, jusqu’ici, à admettre l’évidence de la faute ni l’urgence de la devoir corriger. A présent, c’est fait et tant mieux, n’en déplaise aux chauvins !

Jemal Ould Yessa

● Lien média https://www.chezvlane.com/Jemal-Ould-Yessa-Boubacar-Messaoud-La-rehabilitation-tardive-d-un-symbole_a32524.html

● L’impunité juridique perpétue l’esclavage en Mauritanie – [IRA-Mauritanie]


Le représentant d’IRA à Boghé (Localité dépendant de la région du Brakna, située à 150 km au sud-ouest d’Aleg, la capitale régionale), Mr Khoumeyni Laghdaf, informa la mission d’IRA le samedi 14 octobre 2023 qu’il a trouvé un enfant, Mahmoud Abdallahi (10 ans), dans un piteux état après avoir marché 18 km à pied et qu’il l’a emmené au commissariat de police en attendant de trouver quelqu’un de sa famille ou de la famille qui l’exploitait. L’enfant Mahmoud Abdallahi est de la localité de Mayguoum, située dans département de Bababé (à 80 km de Boghé, dans la Vallée du fleuve Sénégal) et travaillait à Dourweit entre les municipalités de Boghé et Bouhdida à 90 km de sa famille à Mayguoum. Il gardait les troupeaux pour son exploiteur Bah Abdelwehab mais quand ce dernier a appris que des activistes d’IRA, réputés rigoureux et entreprenants, à travers les plaintes qu’ils portent devant les tribunaux contre les esclavagistes et trafiquants d’enfants en faveur des victimes, sont dans la région, ils se sont empressés de chasser l’enfant pour éviter d’être découvert en flagrant délit d’esclavage et d’exploitation de mineur.
La délégation d’IRA est arrivée à la brigade de Boghé le 14 octobre 2023 à 10h30 et a trouvé le commissaire de police de la ville, sur le point de libérer le bourreau Bah Abdelwehab. L’enfant a été signalé et son exploiteur dénoncé par les militants locaux (section IRA de Boghé) qui avaient intercepté le garçon Mahmoud Abdallahi en détresse et en errance. La délégation d’IRA a demandé les raisons de cette libération prématurée ; l’officier de police judiciaire leur répondit que la mère de la présumée victime Mahmoud Abdallahi a dit qu’il est né en 2003 et qu’il est majeur donc le procureur d’Aleg Cheikh Baye nous a dit de le libérer. La délégation a demandé des preuves car de l’enfant ne leur parait pas avoir plus de 10 ans. Quelques minutes après le commissaire est revenu leur dire : « nous, on ne travaille pas avec les organisations, on travaille seulement avec le procureur et il nous a dit de le libérer ». La délégation lui a expliqué que s’il le libère, il devra les mettre à sa place. Le commissaire comprit le message et après quelques échanges entre la délégation d’IRA et le procureur, le commissaire revient quelques instants après pour le mettre sous contrôle judiciaire. La délégation lui demanda de leur confier la garde de l’enfant, il a répondit qu’il faut l’autorisation du procureur mais poursuit-il : « il est avec sa mère et ne trouvera pas mieux qu’elle pour le garder » la délégation répliqua que sa mère est complice de son exploitation et qu’elle doit être mise aux arrêts elle aussi. Ainsi le procureur refusa de l’éloigner du commissariat et de ses exploiteurs le commissaire a pris le soin de violer la procédure en s’entêtant à garder l’enfant dans le lieu de détention de la police avec le présumé exploiteur de l’enfant Bah Abdelwahab et la mère de l’enfant Vatimetou Mamadi qui est elle aussi esclave de l’exploiteur et à laquelle l’exploiteur a fait appel pour témoigner à sa décharge contre les allégations de l’enfant.
Le 17 octobre le procureur Cheikh Baye ordonne le transfert du dossier de la police vers la gendarmerie et le 18 octobre 2023, ils sont déférés devant le procureur de Aleg qui les a accusé d’exploitation de mineur et les a renvoyé vers le juge d’instruction Moctar Mohamed Hacen avec une demande de contrôle judiciaire justifiant cette clémence qu’il s’agit d’une femme, et d’un homme âgé et souffrant de diabète. Le juge d’instruction s’est contenté d’une garantie de présence.


Nouakchott 20/11/2023
La commission de communication

● La banalisation des crimes d’esclavage accentue ses pratiques en Mauritanie – [IRA-Mauritanie]

Protagonistes :
Présumés coupables : Hamoud Elvil
Prétendus parents de la victime : Vatimetou Mamadou et Mohamed Habib M’Bareck et son épouse Kebada
Victimes : Hacen Mohamed Mahmoud alias Jibril Mohamed (11ans)
Plaignante : Roughaya Chedad
Procureur : Cheikh Baye
Commandant de la brigade de gendarmerie : Leylily Mohamed Hacen
Juge d’instruction : Moctar Mohamed


Le jeudi 11 octobre 2023, une mission d’IRA conduite par le responsable de l’action de protection des droits de l’homme Abdallahi Abou Diop, accompagné de Mohamed Laghdaf Néma s’est rendue au Brakna (région située au sud-est de Nouakchott). Cette mission répond à l’appel au secours de madame Roughaya Chedad qui les informa que son fils disparu depuis 5 ans a été retrouvé avec le bourreau-esclavagiste du nom de Hamoud Elvil qui l’exploitait ; il s’agit de l’enfant mineur Hacen Mohamed Mahmoud âgé de 11 ans et qui s’appelle désormais Jibril Mohamed
La délégation est arrivée à la brigade de gendarmerie le 11 octobre 2023 à 22h. Ils ont pu échanger avec la dame Roghaya Chedad dite Vatimetou Mamadou et ses proches qui les ont informés qu’il y a une seconde famille qui réclame l’enfant et prétend que c’est leur fils et qui l’appellent Jibril Mohamed et qu’ils sont présentement à l’intérieur de la brigade de la gendarmerie avec le commandant. Ce dernier était au courant de l’arrivée de la mission d’IRA ; la mission informa le gendarme du but de leur mission et qu’ils sont venus assister, encadrer et accompagner l’enfant et sa famille. La gendarmerie avait déjà arrêté les présumés coupables Hamoud Vil et Mohamed Habib M’Bareck, la mère de la famille qui prétendait que c’est leur fils ainsi que l’enfant victime. La délégation d’IRA a beau expliquer au chef de brigade que l’enfant est mineur et victime et il n’a aucune raison de l’arrêter mais il a répondu que ce sont les ordres du procureur. Il prétend que l’enfant n’est pas formellement en garde à vue, mais il est retenu en compagnie des suspects mis aux arrêts selon les ordres du procureur du tribunal d’Aleg le juge Cheikh Baye Moustapha.
Le lendemain vendredi 13 octobre 2023 la mission d’IRA est revenue à la brigade dès 8h 30 le matin, ils ont constaté que l’enfant mineur et victime est placé avec ses bourreaux dans la même cellule. Ils ont dit au chef de brigade de la gendarmerie, l’officier de police judiciaire chargé d’instruire l’affaire, le nommé Leylily Mohamed Hacen, qu’il a biaisé toute l’enquête en mettant les bourreaux et la victime dans un même lieu où ils ont séjourné et passé la nuit ensemble. L’officier s’est empressé de séparer l’enfant de ses présumés bourreaux, mais le mal était déjà fait.
La délégation d’IRA a ensuite quitté la brigade de gendarmerie pour le tribunal d’Aleg ; ils ont attendu longtemps avant l’arrivée du procureur aux environs de 11h. Ils ont expliqué au procureur les manquements à la procédure très stricte sur la protection des mineurs face à leurs présumés bourreaux, fautes procédurales très graves commises par l’officier de police judiciaire notamment le fait d’arrêter la victime et de la mettre avec ses bourreaux. Bien sûr que les responsables d’IRA ont expliqué au procureur que l’officier gendarme a prétendu que c’est le procureur lui-même qui lui a ordonné de garder la victime dans la même cellule avec le suspect et dans le lieu de détention qui est la brigade de gendarmerie d’Aleg (Ville chef-lieu de la région du Brakna située à 300km au sud-est de la capitale mauritanienne Nouakchott). Le procureur convoqua séance tenante l’officier gendarme chef de brigade et lui fait part des griefs émis contre la procédure par les délégué d’IRA. Mais aucune sanction ou mesure n’a été prise contre l’officier de gendarmerie , ce qui prouve que le procureur comme tous les juges mauritaniens, n’est pas étranger à cette violation de la procédure qui fait partie des longues chaines de violations commises par les juges et les officiers de police judiciaire contre les victimes de l’esclavage en Mauritanie.
La mission d’ IRA sollicita auprès du procureur de lui donner la garde de l’enfant jusqu’à la fin de l’enquête, le procureur refusa prétextant qu’IRA est partie civile dans cette affaire et a demandé à l’enfant de choisir avec qui il veut partir. L’enfant choisira la femme qui le louait au bourreau qui l’exploitait, il s’agit de Kebada l’épouse de Mohamed Habib M’Bareck.


Le chef d’inculpation retenu contre les accusés est : Exploitation de mineurs.
Le Juge d’instruction met les présumés coupables sous contrôle judiciaire malgré la requête du procureur de leur délivrer un mandat de dépôt. Ce dernier a fait appel de cette décision inexplicable.


Nouakchott 20/11/2023
La commission de communication

● Projet AFRAB – retour de Dar es Salam | Message de remerciement du président d’IRA-Mauritanie

Message de remerciements pour les concepteurs et acteurs de AFRAB et d’informations pour le public abolitionniste.
J’informe tous les collègues, chercheurs ou activistes, avec qui j’ai partagé une excellente semaine à l’université de Dar es Salam, dans le cadre du projet AFRAB, que je suis arrivé au sein de la famille à Dakar, en parfaite santé et dans des bonnes conditions. Je compte aussi mobiliser des chercheurs mauritaniens, basés à l’université de Nouakchott ou dans des universités étrangères, pour rallier le projet et la conception AFRAB, une idée géniale qui contribuerait beaucoup à l’effort africain et mondial visant à informer sur l’esclavagisme en vue de son éradication totale.
Le projet AFRAB (acronym de «African Abolitionism: The Rise and Transformations of Anti-slavery in Africa») a soutenu et financé la participation de 32 participants, dont des membres du réseau G5 Sahel contre l’Esclavage, à la conférence UDSM en Dar es Salaam du 6 au 10 novembre 2023. Le G5 Sahel est un consortium d’ongs anti-esclavagistes, travaillant au Mali, Niger, Mauritanie, Tchad, Burkina Fasso et autres pays du Sahel, Sahara ou Afrique de l’Ouest. Le G5Sahel Contre l’Esclavage est dirigé par Ali Bouzou, secrétaire général du consortium et président de l’organisation Timidria du Niger. AFRAB est coordonné par la professeure Benedetta Rossi, basée au Département d’histoire de l’université « University College London » (UCL) à Londres, au Royaume-Uni. AFRAB est financé par le Conseil Européen de la Recherche (convention de subvention n° 885418).

Biram Dah Abeid

12 novembre 2023